Cette agglomération nouvelle, créée à la suite de la saturation du plan d'occupation du sol (POS) et des risques imminents des glissements de terrain de la capitale de l'Est ainsi que l'accroissement de la population, fut érigée sur les terres agricoles du plateau de Aïn El Bey dans la commune d'El Khroub. Les paysans et les ouvriers agricoles occasionnels de la ferme d'Etat Kadri Brahim furent délogés de leurs logis de fortune pour céder les parcelles servant d'assiettes pour la construction des bâtiments et autres équipements sociaux. D'emblée, les îlots des appartements sont immatriculés unités de voisinage (UV) suivie d'un numéro pour déterminer les secteurs urbains. Ainsi, l'UV n°6 est occupée par les anciens habitants d'El Khroub appelée Lekouara, en référence au nombre important des écuries de l'ex-village. L'UV n°7 est habitée par les habitants venus de l'ex-dépotoir de Constantine (Boulefraïs) appelée El Kahira (Le Caire) en référence à la surpopulation de cette capitale arabe où les gens logeaient même dans des cimetières. L'UV n°8 regroupe principalement les habitants du bidonville du lieudit 4e km, dénommé New York (Constantine) et enfin l'UV n°9 abrite les sinistrés de l'habitat précaire du quartier de l'Emir Abdelkader (ex-Faufourg Lamy de Constantine). Le reste des appartements sont appelés AADL en référence à l'agence du développement du logement qui en est le promoteur. Les malfaçons de construction des appartements sont nombreuses. On cite pour l'exemple l'étanchéité. Le bâtiment A2, îlot 3, UV 7 est révélateur. Cette bâtisse a enregistré deux années de retard pour que le CTC décide leur conformité afin de les attribuer. Ce quadrillage des populations, selon leurs origines géographiques, est perçu comme une forme de communautarisme dans une ville ghettoïsée qualifiée de « nouveau bidonville » par nombre d'habitants à la recherche d'un logis ailleurs. Cette situation a été prolifique au développement de toutes les formes de la délinquance. « Il n'y a pas un jour sans que l'on enregistre des agressions à l'arme blanche. » L'hôpital qui souffre grandement du manque d'équipements médicaux enregistre chaque jour des blessés. « Le dernier éclopé était un jeune sur lequel l'on a mis des points de suture à la suite d'une blessure à la hache », raconte une infirmière. C'était le 3e jour de l'Aïd. Le même jour, à 6h à proximité de l'arrêt du bus, un jeune homme a failli être lynché par un délinquant qui lui assené des coups de couteau. Heureusement pour la victime qui s'en est sortie avec une lacération de son veston. Il n'a du son salut qu'à une intervention des voisins. Les batailles rangées entre gangs sous l'effet de la drogue et des psychotropes sont courantes. Gare à celle ou celui qui s'aventure à se lever très tôt ou à veiller. « La police est planquée dans son commissariat et n'intervient qu'à la suite d'un drame », nous confie un citoyen insurgé quant à « l'insécurité régnante dans cette soi-disant nouvelle-ville ! ». « Elle n'assure même pas la réglementation de la circulation à travers les principales artères », soutient un habitant, venu de la « poudrière », lieu qualifié à hauts risques. Le transport est vécu comme un calvaire par les usagers qui se dirigent essentiellement vers le chef-lieu de la wilaya. « Pour une quinzaine de kilomètres, le bus met une heure et demie avec les multiples arrêts intermédiaires. Les taxis assurent uniquement les liaisons durant la fluidité de la circulation, le reste du temps, il faut courir pour prendre un clandestin », affirme un fonctionnaire. Le nombre de bus assurant les dessertes vers Djebel Ouahch-El Khroub est plus important (respectivement 45 et 15) que ceux qui se dirigent à Constantine ville. Les équipements sociaux sont pour la plupart non encore réceptionnés et ou inexistants. Le siège de la Gendarmerie nationale se trouve dans les vides sanitaires d'un immeuble. Le marché offre un spectacle désolant à travers des stands de commerces constitués de chutes de bois de coffrage, de tôles et de pneus usagés posés sur les toitures. A lui seul, il constitue un bidonville dans le centre de cette nouvelle ville. Les déchets, ordures ménagères et autres monticules de gravats jonchent les abords des immeubles, des rues et des bandes des futures trottoirs. Ce qui complique davantage l'intervention de l'Entreprise publique communale d'assainissement (EPCA). Tout visiteur constatera qu'il n'y a rien de particulier qui puisse hisser cette agglomération au statut de « nouvelle-ville », mais qu'il s'agit d'une méga-banlieue des banlieues constantinoises porteuses de germes de violence et d'insécurité où la mobilité des habitants faite dans l'esprit communautaire et régionaliste aggravera le vécu de ces populations broyées par le dénuement et la misère dont elles ne peuvent plus honorer leurs charges locatives.