Les élections législatives vont-elles dynamiter le RND ? Le risque est plausible. La confection des listes de candidature a mis au jour des dissensions profondes, longtemps «étouffées» par la gestion «autoritaire» d'un Ahmed Ouyahia qui dirige le parti «d'une main de fer». Désormais, des voix s'insurgent pour contester les décisions du secrétaire général du parti. Jeudi passé, les militants de Batna ont fermé le siège du bureau régional du RND, contestant les choix de candidats. Tandis que dans d'autres wilayas, comme à Béjaïa, Tamanrasset, Béchar, Saïda et Mascara, la grogne prend de l'ampleur. La discipline que fait régner le secrétaire général se fissure et des cadres du parti ne cachent plus leur mécontentement. Certains se sont retirés de la course, d'autres ont tout simplement refusé de se porter candidat. C'est le cas de Nouria Hafsi, membre du conseil national du parti et néanmoins secrétaire générale de l'Union nationale des femmes algériennes (UNFA), qui a retiré sa candidature dans la wilaya de Saïda. «Les faiseurs de décisions au sein du parti se sont opposés à ce qu'elle conduise la liste du RND à Saïda», a indiqué un militant du parti. Connue pour être une «grande gueule» au sein du parti, Nouria Hafsi ne compte pas se retirer et rentrer chez elle, mais envisage de passer au stade supérieur dans sa contestation, à en croire une source proche du parti. La secrétaire générale de l'UNFA n'est pas la seule femme au RND à exprimer sa colère. Mme Djaafar, ministre déléguée chargée de la Famille et de la Condition féminine, également membre du bureau politique, a refusé de se porter candidate à Sétif ; elle aurait exigé de conduire la liste dans cette circonscription, ce qui lui a été refusé au profit du coordinateur du parti, Boulifane, un ancien sénateur. L'ancien chargé de l'organique du parti, Khalfa Mbarek, qui est aussi secrétaire général de l'Organisation des enfants de moudjahidine, sort des rangs du parti pour conduire une liste indépendante à Alger. Mais il aurait échoué à obtenir les parrainages nécessaires pour valider sa liste. A Alger justement, où la bataille sera rude, la liste du RND sera conduite par Sedik Chihab. Pièce maîtresse du parti dans l'Algérois et homme de confiance d'Ahmed Ouyahia, Chihab conduit une liste où la parité homme/femme est respectée. Cinquante-cinquante. Cependant, avant la confection de la liste d'Alger, les poids lourds du parti se sont livrés une bataille larvée. La raison ? Abdeslam Bouchouareb, ancien ministre et chef de cabinet de Ouyahia au sein du parti, a tout fait pour imposer sa candidature à Alger. «Chassé» par les militants d'Oum El Bouaghi où il devait être candidat initialement, Bouchouareb s'est rabattu sur Alger où il est «venu encombrer» la liste. Harchaoui, Berraf et Djenouhat ont «préféré de ne pas se présenter à cause de lui», a révélé un cadre du RND. Même si officiellement, le parti dit qu'«ils ont volontairement choisi de ne pas se présenter». Pourtant, des militants du parti, à Alger, dénoncent le fait que certains responsables qui «traînent des casseroles font tout pour être députés et s'assurer ainsi une immunité et, du coup, une impunité». Allusion à Bouchaoureb, dont le nom est cité dans l'affaire Khalifa. Il aurait bénéficié d'un crédit de plus de 12 millions de dinars qu'il aurait refusé de rembourser, ce qui avait poussé le liquidateur de Khalifa à déposer une plainte contre lui. L'affaire «sommeille» à la Cour suprême. Ainsi, le RND, qui espère au moins préserver sa seconde position dans la future Assemblée nationale, risque d'y laisser des plumes. D'autant que d'anciens membres fondateurs du RND, tels Noureddine Bahbouh et Tahar Benbaïbèche, ont fondé leurs partis ; ils comptent chasser sur le terrain du RND, notamment à l'est du pays. Mais le porte-parole du parti, Miloud Chorfi, minimise les dégâts : «Tout se passe normalement, il y a des mécontentements car on ne peut pas mettre tout le monde tête de liste, c'est cela, la démocratie ! Notre parti se porte bien.» «Notre objectif est d'arriver en tête des élections», a-t-il souhaité. Pas évident.