A Souk Ahras, 34 listes sont proposées aux électeurs des 26 communes que compte la wilaya. Entre ceux qui briguent les 6 sièges de l'APN et ceux qui animent une campagne entamée depuis des mois, c'est toute l'histoire d'un circuit catalyseur d'opinions qui sévit auprès des populations vulnérables et des tribus des candidats. Les chefs de file des premiers reçoivent fonds et offrandes et nourrissent les autres de promesses ; les seconds invoquent les avantages d'un enfant du douar propulsé à un poste supérieur. Ils ne tournent pas le dos, non plus, à un groupe de gens soigneusement fringués, prolixes en matière d'éloges à l'adresse des ascendants et surtout munis d'argent. Avant d'atteindre cette étape, c'est au niveau des états-majors des partis que le négoce autour des positions est géré par des intermédiaires initiés au «marché». Tout est déjà campagne : bains de foule, dîners en grande famille, couffins aux nécessiteux, discours propagandistes, veillées avec des amis d'enfance… et surtout argent qui coule à flots. Il y aurait même des candidats subventionnés par des Qataris et d'autres sollicités par des filières de blanchiment d'argent. A Skikda, selon un élu du FLN, il faudrait plutôt voir du côté des listes indépendantes et des nouveaux partis. «Les candidats de ces listes n'ont aucune expérience politique. Ce qui les attire c'est l'argent, d'ailleurs il suffit juste de consulter les têtes de liste pour reconnaître parmi eux une majorité d'hommes d'affaires, d'entrepreneurs et de nantis», lâche-t-il. Mais puisque ces gens sont assez riches, pourquoi courent-ils derrière l'argent ? «On n'est jamais assez riche», rétorque notre interlocuteur, qui poursuit : «Ces gens veulent l'immunité parlementaire. C'est une belle aubaine à fructifier durant le mandat.» Pour l'autre clan, ce seraient plutôt les anciens partis qui vendent les premières places de leurs listes. «Chez ces partis, c'est plutôt la guerre des foules qui oppose leurs partisans. Je ne voudrais pas nommer les gens, par correction, mais je vous invite à feuilleter avec moi les listes du FLN, du RND, du PT, du MSP… Plusieurs candidats en lice sont connus beaucoup plus pour leur richesse que pour leur parcours politique. Dans certains de ces partis, le classement se fait au hit parade des plus offrants.» Mais à qui offre-t-on ? «Aux décideurs locaux pour certains partis et centraux pour d'autres.» A Tébessa, on va du militantisme au mercantilisme. Le niveau d'instruction et le militantisme ont été bannis dans le choix de la liste électorale, l'enjeu de l'argent et l'appartenance tribale demeurent «les maîtres mots inavoués». L'on apprend d'une source digne de foi qu'une tête de liste a été estimée entre 4 millions de dinars et 10 millions de dinars pour les anciens partis, alors que pour les jeunes formations politiques, la somme demandée pour une place en tête de liste ne dépasse pas les 400 000 DA. Une pratique jugée «nuisible» qui se répercute négativement sur l'action politique, du fait que le jeu électoral est devenu une véritable enchère pour certains coordinateurs et présidents de partis politiques comme le FLN, le RND, le FNA et d'autres encore, où le dernier mot est pour celui qui dit «mieux». Ces derniers sont perçus par les habitants de Tébessa comme des mercantiles car ils ont marginalisé le militantisme et privilégié l'argent en imposant des listes électorales contestées d'une part par la base militante qui a immédiatement réagi par des démissions collectives (à l'instar du RND) ou par le ralliement à d'autres partis (comme ces centaines de Flnistes) ou la désunion (au sein du FNA), et d'autre part par les citoyens.