Les Algériens ne sont pas des masochistes pour donner leur voix au FLN. Il n'y a pas eu fraude massive lors du scrutin du 10 mai, il y a eu pire : un coup de force inacceptable.» Tel est le premier constat fait par Louisa Hanoune, porte-parole du Parti des travailleurs. La première dame du PT n'a pas caché, hier, sa colère et son indignation quant aux résultats donnés par le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia. Mme Hanoune crie au scandale. Selon elle, son parti a été spolié d'une dizaine de sièges et cela s'apparente, dit-elle, à une sanction politique, car ses positions dérangent. Mais le PT dérange qui ? Mme Hanoune répond : «Il dérange ceux qui défendent une minorité mafieuse, ceux qui défendent les multinationales, ceux qui se prononcent pour le retour à la privatisation…» «Nous avons été sanctionnés car nos positions gênent. Le PT est la principale force de mobilisation et aucun Algérien ne peut croire à une telle mascarade qui dépasse l'entendement», a soutenu Mme Hanoune lors d'une conférence de presse animée, hier, au siège du parti. Pour la responsable du PT, les résultats annoncés sont une provocation énorme contre la majorité du peuple, ceux qui ont voté comme ceux qui se sont abstenus : 220 sièges pour le FLN ? Un score irréel pour Mme Hanoune, comme les 20 sièges dont a été crédité son parti. Le leader du PT estime que les engagements du chef de l'Etat n'ont pas été respectés puisque les résultats du scrutin ont été complètement modifiés au profit du FLN pour l'essentiel. Et le taux de participation a été gonflé dans ce but. Ce scrutin est, d'après Louisa Hanoune, digne des pires pratiques staliniennes, voire à la Ben Ali et, de ce fait, expose le pays aux turbulences. Elle ne comprend pas cette démarche et s'interroge : à quels desseins et pour quelle politique cette opération a-t-elle été réalisée ? Elle est toutefois persuadée que ceux qui ont osé trafiquer massivement les élections faisaient fi de l'environnement international et régional dangereux, mettant en péril la nation : «Ceux qui ont confisqué la souveraineté populaire ne cherchent-ils pas à provoquer un Printemps arabe en Algérie ?» La SG du PT argumente sa crainte par le fait que la fraude a pris la forme d'«un hold-up électoral exprimant un mépris intolérable à l'égard du peuple, de son intelligence». Elle compte déposer des recours et envisage de saisir le président de la République pour lui signifier, entre autres, que «l'administration n'a pas été neutre, elle a violé la loi électorale et le dispositif de surveillance et de supervision des élections a été balayé à tous les niveaux». «Le ministre de l'Intérieur a annoncé des résultats alors que les commissions de wilaya n'avaient pas finalisé le décompte des voix. Ce sont des résultats fabriqués, que nous rejetons dans le détail et la globalité», explique l'oratrice, en illustrant ses propos par un exemple : «Le PT a obtenu à Alger, selon les résultats du dépouillement, 11 sièges. Le lendemain, 4 de ses sièges ont été détournés grossièrement.» Interrogée sur le satisfecit des observateurs européens, Mme Hanoune se dit étonnée de voir que les observateurs n'ont rien vu et n'ont constaté aucune anomalie. «Ceci nous inquiète et nous pousse à nous interroger sur les gages que ces observateurs ont reçus de la part du pouvoir. La transparence des élections ne saurait être l'œuvre des observateurs. Nous sommes apparemment toujours dans les pratiques exécrables du parti unique», renchérit-elle. Invitée à faire sa lecture de l'analyse de Ould Kablia qui a évoqué «le vote-refuge» des Algériens, la responsable du PT fustige le ministre qui n'hésite pas à dire une chose et son contraire et, maintenant, trouve des justificatifs aux résultats du scrutin. «Un vote-refuge par rapport à quoi ? Cette explication est ridicule et aucun Algérien n'avalera cette couleuvre», déclare Mme Hanoune. Notons que le bureau politique du PT doit se réunir pour étudier et décider des actions à entreprendre, notamment en ce qui concerne son retrait ou pas de l'Assemblée.