Rares parmi les anciens élèves - du temps jadis - à ne pas avoir en mémoire un souvenir à raconter pour décrire une ambiance particulière : l'angoisse qui enveloppe les salles de classe lors des séances hebdomadaires de dictée. Le verdict de la note finale a hanté bien des nuits d'élèves, celles des forts en calcul notamment. Pour ceux qui l'ignorent - et ce n'est pas de leur faute, cette activité ayant disparu du paysage scolaire -, la dictée jouit d'un respect jamais démenti auprès des pédagogues. Elle est conçue en tant que contrôle synthétique des connaissances engrangées par l'élève dans les leçons de grammaire, de conjugaison et de vocabulaire. Elle permet à l'élève de mobiliser son attention sur les mots et les règles apprises au préalable. Lue à haute et intelligible voix, la dictée est toujours associée à l'orthographe, cet art d'écrire correctement selon la manière imposée par l'usage et la règle. Ce fut l'Académie française - où trône depuis 2005 notre Assia Djebar nationale - qui décida de codifier les règles et les bizarreries de la langue de Molière. C'était en 1693, année qui vit Charles Perrault, l'un des initiateurs de ce projet colossal, déclarer : « Le but (de cette codification) est de distinguer les gens de lettres d'avec les ignorants... » De nos jours, cette exigence dans l'art d'écrire a pris un coup. La télévision, les jeux vidéo et...le laxisme des adultes lui ont tordu le cou. L'écrit - en français ou dans une autre langue - a besoin d'un engagement sans faille des enseignants. La discipline - dans la graphie pour commencer et l'écriture ensuite - s'acquiert dès les premières années de scolarité : une période où l'enfant découvre la magie des mots, des textes et des livres. Une vérité élémentaire que nous a confirmé la Dictée nationale de langue française qui s'est déroulée à Blida ce mercredi 29 mars. Première édition de la DNF Le lycée El Feth de Blida a déroulé son tapis de roses pour accueillir pas moins de soixante élèves venus de différentes wilayas - et pas seulement limitrophes. Dans leur tête, le rêve de réussir ce rendez-vous culturel et de faire honneur à leur établissement d'origine et surtout à leurs enseignants qui les ont choisis. Concoctées avec minutie et abnégation par les membres de l'association Espoir et Culture de la wilaya de Blida, ces joutes juvéniles ont toutefois bénéficié du soutien de sponsors. Un bon point à souligner que l'intérêt croissant du mécénat pour le monde scolaire. Les entreprises Mouzaïa, Trèfle et Sim se sont distinguées en répondant positivement à la demande des organisateurs. Pour sa part, l'ambassade de France a fait un geste fort apprécié en offrant des livres et des dictionnaires aux lauréats. Concernant l'épreuve en elle-même, nous avons décelé dans le choix du texte et du titre une claire volonté des organisateurs de coller à l'actualité et aux préoccupations universelles. « Préservons notre environnement » est une dictée d'une vingtaine de lignes réparties en trois paragraphes. Les écoliers du primaire étaient invités à s'arrêter à la fin du premier paragraphe, les collégiens à la fin du deuxième et aux lycéens revenaient l'honneur redouté de clore jusqu'au point final du texte. Empreinte du sérieux qui sied à ce genre d'activité, l'ambiance n'a pas souffert de convivialité. Ils étaient beaux à voir ces élèves - filles et garçons scolarisés dans le public et le privé - avec des visages souriants certes, mais animés de la volonté de bien figurer au palmarès. Des diplômes d'honneur, d'encouragements, d'excellence ont été distribués. Au-delà de sa dimension pédagogique indéniable, cette DNF (Dictée nationale de français) a offert à ces jeunes d'horizons divers, l'occasion de se rencontrer et de nouer connaissance. Leur complicité toute de spontanéité a surpris les adultes . N'ont-ils imaginé, élaboré et appliqué avec brio un programme festif en l'espace d'une soirée de préparation ? Cette ambiance a agréablement surpris Gérard Claes, attaché de coopération éducative à l'ambassade de France. Il a assisté à la totalité de ce double événement culturel et pédagogique, subjugué par le talent des participants. Cheville ouvrière de la Coordination des associations d'enseignants de français, Abboub Abdelkader nous a déclaré : « Ce succès, glané ici à Blida, nous encourage à persévérer dans cette voie. Nous comptons asseoir la tradition de la DNF en Algérie. »