L'acteur principal de Devdas, adulé en Inde, est désormais une star mondiale. C'est un acteur qui dément le «signe indien», bien qu'il soit du pays de «Mangala, fille des Indes» et de «Djanitou». Il est beau. Il a 47 ans et toutes ses dents, pour ne pas dire ses «dons», d'éternel jeune premier et jeune loup de Bollywood. Il est célèbre dans le monde entier et il est particulièrement adulé au Maghreb. Son nom claque ! Shah Rukh Khan n'est autre que la superstar du film Devdas. En Inde, on l'a affublé d'un titre royal : King Khan ! Récemment encore, la preuve patente de la notoriété de Shah Rukh Khan aura été fournie à la dernière édition du Festival international du film de Marrakech (du 30 novembre au 8 décembre 2012). Son passage sur le tapis rouge, avant la cérémonie d'hommage au cinéma indien – qui célèbre ses 100 ans d'existence – a galvanisé le public présent en masse. Ainsi, Shah Rukh Khan s'est offert un bain de foule délirant, serrant des dizaines de mains, signant des autographes sur des posters à son effigie, discutant avec certains et saluant son fan-club, pour ne pas dire son «femmes-club», car c'est parmi la gent féminine que se recrutent en premier lieu ses admiratrices. Il est resté un bon moment sur le «red carpet». C'est dire sa disponibilité et son accessibilité, de plus en plus rares chez les stars. A Djamaâ El F'na, la fameuse place pittoresque de l'oasis ocre, le cœur de 15 000 spectateurs a battu la chamade et la mesure pour cet immense acteur venu présenter le dernier film de Yash Chopra, le grand réalisateur indien récemment disparu, Jab Tak Hai Jaan (Jusqu'à mon dernier souffle). Avoir laissé un tournage pour venir rencontrer ses fans au Maroc en valait la peine. Et il n'a pas été déçu du voyage. Bluffé à la vue de cette masse humaine impressionnante qu'il n'attendait sans doute pas au Maghreb, lui qui est pourtant coutumier des foules indiennes, Shah Rush Khan tombera la veste et dansera à la manière chorégraphique «bollywoodienne» pour remercier un public en or. Et ce, au grand bonheur des amateurs du genre. «Je suis très reconnaissant envers le public, il le mérite ! Je me sens comme si j'étais né ici. Je me sens chez-moi tant l'accueil est chaleureux et humain. Une telle reconnaissance, une telle joie, un tel lieu profond, ça vous donne des ailes. C'est un bonheur de se retrouver ici !», affirmera-t-il avec déférence. Ce soir-là, Shah Rukh Khan a mesuré l'envergure lointaine de sa célébrité. Il se tenait sur scène tel une pop-star fédérant et haranguant des milliers de personnes. «Je n'aurais jamais imaginé qu'une telle ferveur d'un public à l'endroit du cinéma indien puisse exister. Vous savez, Shah Rukh Khan ainsi que des talents émergents ont apporté une crédibilité au cinéma indien…». Cette précieuse caution émanait d'une autre star, son aîné, la légende vivante du cinéma indien, Amitabh Bachchan. Expliquant le secret du succès de Bollywood, Shah Rukh Khan indiquera : «A Bollywood, nous croyons aux rapports humains et à l'espoir. C'est un sujet universel : la fraternité, l'amour et l'amitié. Devdas est un roman d'amour où je campais un héros romantique. Un classique ayant eu plus de 12 versions». Avec vingt ans de carrière au compteur à Bollywood, Shah Ruh Khan se sent apaisé avec lui-même : «Vingt ans après, je me sens confortable dans le jeu. Je suis plus doux et tendre. Je m'accepte maintenant. Avant, je me cachais…». A propos d'une carrière à Hollywood, il rétorquera : «Mon pays, l'Inde, devient important. Son essor et celui du cinéma-émotion vont de pair, c'est évident. Son cinéma est vu et compris dans le monde. Je ne suis pas un acteur exotique ayant du sex-appeal. Si à Hollywood on me propose un rôle intéressant, oui ! Il ne s'agit pas de rôle de Kung Fu, de danseur ou d'un gars sexy. Mais jusqu'à maintenant, personne ne m'a appelé.» Révérant la mémoire du réalisateur indien Yash Chopra, auteur de grands classiques comme Deewaar (1975), Silsila (1981), Lamhe (1991) ou, plus récemment, Veer-Zaara (2004) qui révéla, entre autres, le talent d'un certain Shah Rukh Khan, il lui rendra un hommage appuyé et émouvant : «A 80 ans, Yash Chopra était resté cet éternel enfant, espiègle et téméraire. Il était heureux de réaliser ses rêves. J'ai tourné dans son dernier film. Il m'avait dit alors : ''C'est mon dernier film. Je sens que c'est le bonheur ultime''. C'était un film prémonitoire. Yash Chopra était unique en son genre…». Le dernier film de Yash Chopra, Jab Tak Hai Jaan (Jusqu'à mon dernier souffle), avec Shah Rukh Khan, Katrina Kaif et Anushka Sharma est très actuel, juvénile et frais ! Une histoire de triangle entre un artificier de l'armée indienne exerçant au Cachemire et deux femmes. Et cela entre passé et présent, et entre l'Inde et l'ancien Royaume-Uni. Odyssée d'un film Devdas est un roman bengali publié en 1917 par l'écrivain Sarat Chabdra Chatterjee. Qualifié de Roméo et Juliette indien, il relate l'histoire d'un amour impossible entre Devdas, fils d'une famille riche, et Parvati, sa belle et pauvre voisine. Il faut savoir qu'en Inde, c'est la famille de la fille qui paye la dot. Le roman a connu au moins douze adaptations cinématographiques, ce qui est peut être un record mondial en la matière. La première remonte au cinéma muet, en noir et blanc. Réalisée par Naresh Mitra, pionnier du cinéma indien, elle date de 1928. Cas unique au monde, le réalisateur et acteur, P. C. Barua, a réalisé trois adaptations de Devdas en 1935, 1936 et 1937 ! C'est la version de 2002 de Sanjay Leela Banshali, avec l'acteur Shah Rukh Khan, qui connaîtra un extraordinaire succès international, marquant la reconnaissance de Bollywood dans le monde.