Au chef-lieu de la wilaya de Tipaza, une célébration officielle s'est déroulée, dans l'après-midi du 10 avril, dans l'une des mosquées de la ville, en présence des autorités locales et de nombreux fidèles, selon un programme préparé par la direction des affaires religieuses de la wilaya, à l'occasion de la fête du Mawlid Ennabaoui. À l'instar des bouchers des autres localités, ceux de Tipaza étaient pris d'assaut pour l'achat du poulet. Les responsables des services de sécurité avaient déjà mis en place un dispositif à Cherchell, dès la fin de l'après-midi, pour éviter toutes sortes de dérapage et de violence dans cette ville qui, habituellement, enregistre chaque année, lors de la célébration de cette fête religieuse, un afflux incroyable de citoyens. La m'nara, la procession, les chants, les explosions de pétards, les fumigènes, autant d'éléments qui faisaient entrer en transe les jeunes, qui, à la fin, s'adonnaient à des actes de vandalisme. Les dégâts occasionnés l'année dernière avaient effrayé les familles. Pour le Mawlid Ennabaoui 2006, les trois imams des mosquées de Cherchell n'ont pas cessé de sensibiliser les fidèles afin de ne plus commercialiser et ne plus utiliser les pétards. Bien que la loi interdise l'affichage sauvage, les murs de la ville étaient « décorés » par des affiches allant dans le sens du discours des imams. Le mot d'ordre avait été largement suivi. L'Office du tourisme de Cherchell avait organisé une simple manifestation culturelle au cercle de la fraternité du Mouloudia local. Une fête symbolique organisée par cette association, à laquelle étaient conviées les générations de cherchellois et les autorités locales, qui s'étaient montrées attentives aux propos du conférencier et à la musique de la jeune troupe musicale locale. Il est 22 h. La ville est quadrillée par les éléments des services de sécurité. Les grappes de jeunes, qui semblaient perdues dans cette ville devenue presque déserte, avaient convergé vers la place publique pour « se défoncer » et libérer leur énergie. Vraisemblablement, pas du tout informés, beaucoup d'entre eux sont arrivés par bus ou par voitures pour participer à la fête. Quelques explosions retentissent sporadiquement, tandis que des « tirs d'artillerie » tentent de briser le silence. Les policiers observent les « jeunes fêtards ». A la sortie est de la ville, un embouteillage de véhicules, accompagné par un concert de klaxons, est improvisé. Une autorité de la daïra est en discussion avec le chef de brigade de la gendarmerie de Cherchell qui tenait dans sa main un talkie-walkie, tout en observant les rares familles qui se sont aventurées à sortir à cette heure tardive de la nuit. Les véhicules de police sillonnaient les rues et accompagnaient les petits groupes de jeunes qui allaient regagner leurs lointains quartiers. Les derniers minibus quittaient en trombe la ville, transportant des bruyants passagers qui balançaient leurs derniers cris, en exprimant leur ras-le-bol. Il est minuit et demi. Le silence règne à Cherchell. Regrets pour les uns, mais soulagement pour les autres. A Koléa, la célébration s'est déroulée dans une autre ambiance, marquée par des festivités plus religieuses, à l'initiative de l'association culturelle Fen El Açil.