Un peu plus d'un mois après son passage, à guichets fermés, à l'Olympia de Paris, Idir s'est produit vendredi soir à la salle Olympia de Montréal devant plus de 2000 fans. Montréal (Canada) De notre correspodnant Il a renoué avec un public qui le connaît très bien et qu'il a rencontré la dernière fois en juillet 2008, à l'occasion du festival Nuits d'Afrique de Montréal. Le concert a été organisé dans le cadre du 21e Festival de musique du Maghreb, en collaboration avec le Festival culturel nord-africain. La première partie de la soirée a été assurée par Berbanya, un groupe berbère de Montréal. «La communauté de Montréal a eu la chance de recevoir ces derniers mois les grands noms de la chanson kabyle (Aït Menguellet, Takfarinas, Akli Yahiaten, Allaoua, Nouara... ), il ne manquait qu'Idir», affirme Mourad Mahamli, président du Festival culturel nord-africain et animateur d'émissions radiophoniques berbères. Idir n'est pas revenu à Montréal les mains vides. Il a apporté avec lui son nouvel album Adrar Inu (Ma montagne), sorti en février dernier, où il marque un retour aux sources rythmiques traditionnelles kabyles, un choix bien que «dicté» par ses engagements contractuels lui a redonné envie de renouer avec la création. L'inteprète de Ava Inouva connaît son public. Et ce dernier connaît par cœur tout le répertoire d'Idir, au point où il «ne le laisse pas chanter» et relaye le chanteur dans ses concerts. «Ça fait toujours plaisir. On chante pour être écouté. J'ai énormément de chance avec mon public», nous a-t-il dit avec une modestie qui n'est clairement pas feinte. Les organisateurs ont dû changer la configuration de la salle pour pouvoir rajouter des places assises, vu l'engouement suscité par l'annonce de la venue d'Idir. Les raisons qui ont amené Idir à la chanson, sa révolte contre le sort fait à la culture berbère sont toujours présentes. «C'est vrai que nous avons, par exemple, une chaîne de télévision en tamazight mais qui n'a rien à voir avec ce que nous sommes», explique Idir, qui affirme aussi que «tant qu'on ne te reconnaît pas dans ta culture, dans tout ce que tu es, la révolte est toujours là». Les arabophones devraient défendre tamazight «Tous les Algériens ont eu la même part de souffrance pour faire sortir le colonisateur, pourquoi alors renier à toute une partie du peuple d'être simplement ce qu'elle est ?», ajoute Idir. Pour lui, l'erreur est d'avoir jeté le bébé avec l'eau du bain à l'indépendance. «Certes, nous avons sorti la France, mais ce n'était pas nécessaire de sortir Hugo, Rousseau...», explique le fils de Beni Yenni. Le résultat est là : l'obscurantisme s'est infiltré dans la société. L'Algérie idéale pour lui serait une Algérie débarrassée de ses démons. Loin des idées extrêmes de séparation, Idir considère que les Algériens ont le même imaginaire, mais il se pose des questions. «Si les tenants du système estiment qu'il existe deux Algéries, alors que faisons-nous ensemble ? En tout cas, moi, je ne sais pas être autre qu'Algérien», estime Idir, qui rappelle qu'il refuse qu'on lui impose ce qu'il n'est pas. «L'adversaire actuel n'est pas l'Arabe ou l'arabophone, estime Idir, mais c'est l'arabisme», cette idéologie aberrante qui teint la langue arabe d'une sacralité du seul fait que le Prophète (QSSSL) était arabe, oubliant que le plus grand pays musulman au monde, l'Indonésie, n'est pas arabe. D'ailleurs, sur ce point, Idir trouve que le combat pour tamazight devrait aussi concerner les Algériens arabophones. Idir reconnaît aussi que si les Algériens vivaient dans une réelle démocratie, il n'y aurait pratiquement plus de «problème berbère».