Les résultats mitigés obtenus par l'instruction judiciaire de l'affaire Sonatrach II s'expliquent, d'après le ministre, par des «difficultés objectives». Un individu impliqué dans ce genre d'affaires (Sonatrach II, ndlr) relevant de la haute trahison mérite-t-il encore de garder sa place parmi la collectivité nationale (in Liberté, mercredi 8 mai 2013)», assénait, mardi, lors de sa tournée algéroise, le ministre de la Justice. L'affirmation, tombant tel un couperet, de la bouche du garde des Sceaux vaut son pesant de chefs d'inculpation. Jusque-là, aucun responsable du gouvernement n'a osé jeter un pareil pavé dans la mare : qualifier les faits de corruption – révélés dans l'affaire Sonatrach II – de haute trahison. Soupçonné entre autres de collusion avec des intérêts étrangers, Chakib Khelil, l'ex- ministre de l'Energie et des Mines, est-il dans le viseur de la chancellerie ? Pas si sûr. Dans les «textes», l'accusation de «haute trahison» n'est évoquée que dans la Loi fondamentale, et se rapporte exclusivement à la personne du président de la République et à celle du Premier ministre. La Constitution institue une juridiction ad hoc : la Haute Cour de l'Etat, la seule à même de juger des «actes pouvant être qualifiés de haute trahison du président de la République, des crimes et délits du Premier ministre, commis dans l'exercice de leurs fonctions (art. 158)». Pour les «autres», le «reste du monde», les crimes de «trahison» (et espionnage), c'est le code pénal qui s'en charge et qui prévoit (art. 61-71) des peines de mort, d'emprisonnement contre «tout Algérien reconnu coupable de trahison, d'entretenir des intelligences avec des puissances étrangères de nature à nuire à la situation militaire ou diplomatique de l'Algérie ou à ses intérêts économiques essentiels». Jouissant des privilèges de juridictions, les hauts cadres de l'Etat, les ministres, dont certains ont été cités dans les affaires de corruption – du scandale Khalifa à Sonatrach I et II en passant par l'autoroute Est-Ouest, etc.,– ne peuvent être inculpés que par la Cour suprême. Une Cour suprême émargeant aux abonnés absents. «Aux yeux de la justice, toutes les affaires de corruption sont égales ; tous les justiciables sont égaux», prétendait pourtant le ministre de la Justice lors de sa visite à la cour d'Alger, au Ruisseau. Plutôt que de contribuer à rassurer sur la détermination de la justice à faire éclater la vérité et la justice, les pérégrinations algéroises de Mohamed Charfi et ses déclarations semblent avoir refroidi plus d'un et produit l'effet inverse à celui prévu initialement. Sur le «traitement» de l'affaire Sonatrach II, le ministre de la Justice trouve ainsi qu'«il n'y avait aucune raison de faire dans la précipitation». Les résultats mitigés obtenus par l'instruction judiciaire, «toujours en cours», s'expliquent, d'après le ministre, par des «difficultés objectives» liées notamment aux suites données aux commissions rogatoires délivrées à destination de plusieurs pays et par l'étendue et la portée (géographique) des investigations touchant plusieurs Etats et continents.