Les membres du gouvernement et les responsables à tous les niveaux et dans tous les secteurs sont appelés à recentrer leurs efforts sur la nécessaire quête de la paix sociale. La rue algérienne est imprévisible. Il suffit d'un rien pour l'allumer. Le gouvernement de Abdelmalek Sellal le sait bien. Prenant la mesure de la situation socioéconomique très précaire et tendue, il met à exécution, depuis quelques semaines, une stratégie visant non pas à satisfaire tout le monde – une mission impossible d'autant plus que les ressources financières s'amenuisent –, mais plutôt à éviter par tous les moyens d'irriter les gens et de provoquer les populations. Quitte à tordre le cou aux lois de la République. Le Premier ministre, qui s'évertue à combler le vide politique sidéral qui effraie les Algériens pour l'avenir du pays, multiplie d'un côté les actions populistes et bloque de l'autre côté toute décision qui risque d'attiser la colère de la société. L'objectif recherché est le même : apaiser le front social et faire revenir le calme dans nos rues pour un été plutôt doux. Le nouveau contexte politique dans lequel se trouve l'Algérie, aggravé par l'hospitalisation prolongée du chef de l'Etat, pousse ainsi le gouvernement Sellal à redéfinir ses priorités. Eviter d'irriter la population Ce n'est plus la réhabilitation du service public ni la lutte contre la bureaucratie, encore mois la relance de la machine économique productive qui constituent, à l'heure actuelle, l'essence de l'action gouvernementale. Le travail engagé dans ce sens se poursuit, certes, mais au ralenti. Car l'urgence fait que les membres du gouvernement et les responsables, à tous les niveaux et dans tous les secteurs, doivent recentrer leurs efforts sur la nécessaire quête d'une hypothétique paix sociale. Ne pouvant pas débourser indéfiniment de l'argent pour acheter cette paix, le gouvernement opère autrement. Comment ? Il use et abuse du dialogue et cède sur les points moins coûteux, tout en se montrant permissif sur certaines questions d'ordre public, par exemple. D'ailleurs, et c'est une première dans les annales de l'Algérie indépendante, le retrait du permis de conduire sera limité. Annoncée jeudi dernier par le directeur de la sécurité publique de la DGSN, cette décision est très significative dans un pays qui occupe la 4e place dans le classement des routes les plus mortelles au monde. De quel droit une institution chargée de faire respecter la loi décide de ne pas appliquer le code de la route ? Pas de limite juridique pour contenir la grogne sociale. Dans une instruction adressée aux walis et publiée intégralement dans le quotidien l'Expression de jeudi, le Premier ministre appelle à asseoir durablement un climat de travail apaisé à travers le dialogue et la concertation permanents. L'UGTA à la rescousse Il exhorte ainsi les responsables à tous les niveaux à «suivre la situation sociale des entreprises et organismes relevant de leur secteur et apporter toute l'assistance et le soutien nécessaires aux partenaires sociaux pour rapprocher les points de vue, prévenir toute détérioration du climat social et concourir au règlement de tout différend collectif de travail, dans l'intérêt bien compris de l'entreprise et des travailleurs». En véritable pompier, l'UGTA a répondu à l'appel de Abdelmalek Sellal pour éviter le pire à la nation. Dans un climat social délétère, l'UGTA appelle, de son côté, à privilégier le dialogue et la concertation. Une devise somme toute ancienne à la centrale syndicale. Dans un message adressé aux unions de wilaya et aux fédérations nationales de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi-Saïd demande aux instances syndicales de prôner le dialogue. «L'UGTA, consciente des enjeux du développement économique et social de notre pays, qui ne cesse de défendre l'économie nationale (...), a toujours incité et encouragé le dialogue et la concertation à tous les paliers de l'entreprise et du monde du travail», a déclaré Sidi-Saïd, pour lequel l'écoute et la négociation collective «sont une vertu» syndicale. Le gouvernement ne s'arrête pas là. Il se lance dans la chasse à toutes les mesures impopulaires prises ces dernières années pour les geler momentanément. Ainsi, de nouvelles taxes, par exemple, sur l'achat de certains segments de voitures, sont mises au placard. Le prix du pain est maintenu inchangé, malgré le coût de production très élevé qui sera supporté par l'Etat. Des mesures ont été prises pour l'abondance des produits de large consommation durant le mois de Ramadhan. La liste est longue. Réussira-t-il dans sa nouvelle démarche ? Le temps nous le dira.