Selon le bilan 2012 de la Gendarmerie nationale, 2241 enfants ont été victimes de violence intra et extra-familiale. Coups et blessures volontaires, attentat à la pudeur, homicide volontaire, viol, inceste, incitation à la débauche, kidnapping… Les bilans régulièrement établis et les «faits divers» quotidiennement recensés rappellent à tous que les mécanismes de protection de l'enfance restent défaillants en Algérie. «Les chiffres sont alarmants. Lorsqu'on voit la détresse dans laquelle sont plongés trop de familles l'on se rend compte que, si chez certains tout va bien, chez beaucoup d'autres, rien ne va. L'Etat se doit de renforcer ses dispositifs de prise en charge des personnes en situation de vulnérabilité», estime Malika Aït Si Ameur, responsable du programme de renforcement de la famille au sein de l'association SOS villages d'enfants Algérie. Raison pour laquelle les associations se sont mobilisées pour que le législateur renforce la protection de l'enfance. «Parmi les mesures proposées dans ce projet de loi, actuellement à l'étude dans les bureaux de l'APN, l'obligation du signalement des violences et autres formes de maltraitance», affirme-t-elle. Cette disposition rendrait ainsi obligatoire pour les citoyens le signalement aux autorités, forces de l'ordre et services sociaux, des cas d'agression, de sévices, de brutalité, de violence et maltraitance envers des enfants, qu'ils soient leurs proches, leurs voisins ou des inconnus. «Si une personne est témoin de ce type d'abus et qu'elle ne le signale pas, la loi fera d'elle une complice, et ce silence sera considéré comme étant de la non-assistance à personne en danger», explique Mme Aït Si Ameur, au cours d'une conférence-débat autour de la «bientraitance», organisée hier au forum d'El Moudjahid par SOS Villages d'enfants Algérie. D'ailleurs, 33% des enfants placés dans le village SOS sont en situation de danger moral. «Il ne suffit plus de passer outre la maltraitance et d'être sourd aux cris des enfants en se disant ‘‘après tout, ce n'est pas mon enfant, ce n'est qu'un voisin ou un inconnu''», poursuit-elle. Mais le plus important est de prévenir la maltraitance. Pour cela, il est impératif de «comprendre d'où vient, par exemple, la brutalité d'une mère ou d'un père, comment régler et mettre fin à ces violations», ajoute Mme Aït Si Ameur. «La façon d'être parent a changé avec les nouveaux modes de vie de la société. De même, la violence au sein des familles a augmenté avec l'éclatement et le rétrécissement de la cellule familiale. Car la ‘‘grande famille'', grands-parents, tantes, oncles et autres, offraient aide aux parents et protection aux enfants», regrette quant à elle Saida Harkouk, assistante pédagogue au sein de cette ONG. «Dans le cadre de nos programmes, la priorité est d'ailleurs donnée à la bientraitance et aux renforcements des liens parentaux et familiaux», souligne-t-elle. Car la meilleure place pour un enfant reste sa famille. Mais évidemment, pas à n'importe quel prix. «Le juge des mineurs ne sépare un enfant de ses parents et ne le place en famille d'accueil ou en institution qu'en cas extrême. Et le renforcement de la famille tente justement d'aider les parents en difficulté à résoudre leurs problèmes, qu'ils soient matériels ou autres», rappelle M. Ruot, représentant en Algérie de SOS Kinderdorf. D'ailleurs, 57% des enfants placés dans une famille de SOS village d'enfants ont été replacés dans leur famille biologique, et ce, dès que les parents ont pu surmonter leurs troubles et offrir un réel foyer à leurs enfants.