Yasmina Khadra était à Oran, hier matin, où il a animé une conférence de presse à Sidi El Houari. N'y allant pas avec le dos de la cuillère, le désormais candidat à l'élection présidentielle a donné un coup de pied dans la fourmilière, en employant des mots très durs à l'encontre des dirigeants actuels. «Il y a une volonté chez ce pouvoir de ‘‘cheptéliser'' le peuple algérien et de briser toute personne qui réussit à s'en sortir par ses propres moyens», tonnera-t-il devant un parterre de journalistes. Toutefois, il faut noter que l'auteur de A quoi rêvent les loups s'est bien gardé d'attaquer le président Abdelaziz Bouteflika. «De par mon éducation, je n'attaque jamais une personne malade. Tout me sépare de cet homme, mais on ne fait pas de polémique avec un malade. Tout ce que je peux lui souhaiter, c'est un bon rétablissement, et qu'il rentre chez lui, pour se reposer», dira-t-il. Revenant sur sa candidature à l'élection présidentielle, Khadra étonnera plus d'un en faisant cette déclaration : «C'est le personnage principal de mon prochain roman qui m'a lancé le défi de me présenter aux élections. Il faut dire que j'ai fait mener la vie dure à ce personnage. Jusqu'à en faire un martyr. Je me suis dit, pour quelle raison ce personnage va jusqu'à sacrifier sa vie, pour que vive l'Algérie, tandis que moi, je reste tranquillement derrière mon bureau ? Il arrive toujours un moment où il faut savoir passer à l'action, et mettre de côté son propre bonheur pour une cause plus grande.» Et d'affirmer que sa carrière internationale dans la littérature l'a suffisamment prémuni contre le besoin et que, de facto, s'il se lance dans cette course à la présidentielle, ce n'est sûrement pas pour des intérêts personnels, mais au contraire, pour le service de la nation. «J'ai 7 millions de lecteurs dans le monde. Je peux même affirmer être le seul écrivain au monde dont les œuvres sont adaptées à tous les supports culturels. Quelque part, je dois être une fierté pour l'Algérie», lance-t-il. Il est urgent, selon Yasmina Khadra, «d'avoir la noblesse de reconnaître le mérite des autres !» «Regardez Mohamed Arkoun, dira-t-il, c'est une comète qui passe une fois tous les 5 ou 6 siècles. Qu'est-ce qu'on en a fait, nous Algériens, de cette lumière ?» Et de se demander encore : «Pourquoi, ici en Algérie, tout ce qui brille doit brûler ?» Sur sa lancée, le candidat brossera un tableau bien sombre de l'Algérie actuelle, «à deux doigts de devenir le Salvador ou le Brésil question insécurité, et où il y a une décomposition morale et sociale». Sur la question de l'armée, l'ex-officier de l'APN estime que celle-ci doit se contenter de protéger les frontières et d'être apolitique. Enfin, à la question de savoir si, en se présentant à l'élection de 2014, il ne participe pas à un simulacre, il affirmera : «Je ne participe pas à un simulacre. Je me suis proposé, et c'est au peuple de choisir. Aucune bataille n'est perdue tant qu'elle n'a pas été engagée.» Enfin, pour le cas où le candidat Mohamed Moulessehoul (car c'est sous son nom d'origine qu'il devra se présenter, et non sous son pseudonyme d'écrivain) perdrait les élections, ses électeurs pourront toujours se consoler en achetant son prochain livre, dont la sortie est prévue en avril prochain (pendant la tenue de la présidentielle), et dont le titre… surprenant sera Qu'attendent les singes ?