Abdelmadjid Sidi Saïd hors la loi ? Le patron de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA) a, une nouvelle fois, appelé Abdelaziz Bouteflika à briguer un 4e mandat, allant à l'encontre du cadre législatif régissant les activités syndicales. Il a ainsi profité mardi, de la cérémonie de commémoration du 17e anniversaire de l'assassinat de son prédécesseur, Abdelhak Benhamouda, pour réitérer son soutien inconditionnel au président de la République et chanter ses louanges. En a-t-il le droit ? «La loi qui gère les syndicats est pourtant claire à ce sujet : un syndicat peut évidemment émettre des avis concernant la politique du pays, que ce soit en termes de démocratie, d'économie ou autres, mais pas de positions partisanes», rappelle Rachid Malaoui, président du Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (Snapap). Les textes de loi délimitent et cloisonnent donc de manière distincte les activités syndicales et les activités partisanes. D'autant plus que, comme stipulé dans cette loi, les tendances politiques restent personnelles et individuelles. Mais là où le bât blesse est que le secrétaire général de la centrale syndicale clame haut et fort, à chacune de ses interventions, qu'il s'exprime au nom de l'UGTA et des travailleurs. «Nous réitérons notre appel au président et moudjahid Abdelaziz Bouteflika pour qu'il présente sa candidature en perspective d'un quatrième mandat et nous allons faire campagne pour lui. Nous n'allons pas nous contenter de l'inviter à se porter candidat et nous ne comptons pas faire les choses à moitié», rapporte l'APS, ajoutant que l'UGTA «fera campagne» pour lui avec force moyens. «Qu'il puisse s'exprimer à ce sujet en son nom propre, en n'engageant que lui-même, relève de la liberté d'expression. Mais la loi lui interdit de parler en ces termes au nom de la formation et de ses adhérents», estime M. Malaoui. «D'autant qu'un syndicat regroupe des personnes que réunissent des intérêts professionnels mais de sensibilité politique diverses et variées. L'on ne trouve aucune mention ou couleur partisane sur une carte d'adhésion», conclut le syndicaliste. Des lois à «géométrie variable» De même, Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP), explique que les statuts du SNPSSP «interdisent formellement d'avoir et d'émettre une position partisane» et encore moins de se prononcer en faveur d'un candidat ou d'un autre. Et si l'on lorgne du côté de la conformité avec les textes, il semblerait que M. Sidi Saïd soit en contradiction avec les statuts même de l'organisation. Ainsi, dans les statuts de l'UGTA adoptés par le 10e congrès national, en 2000, il est clairement stipulé dans l'article premier que «l'UGTA est une organisation syndicale revendicative, libre et indépendante de toute tutelle partisane, administrative et patronale». Mais au-delà des formations syndicales, l'on a pu voir et entendre de nombreux responsables de diverses associations plaider en conférence de presse, retransmise évidemment dans le journal télévisé de l'ENTV, pour un quatrième mandat du Président. Ces associations s'engagent d'ores et déjà à soutenir et à faire campagne pour M. Bouteflika. Pourtant, la loi régissant la vie associative, adoptée en 2012, est on ne peut plus claire : en plus de l'interdiction de «relations» entre partis politiques et associations, il est procédé à la suspension de l'activité ou à la dissolution en cas d'ingérence dans les affaires internes du pays.