Du côté du ministère du Tourisme et de l'Artisanat, on ne cesse de souligner depuis quelques mois que la priorité est au tourisme interne. Le premier responsable du secteur, Hadj Saïd Mohamed Amine, l'a encore affirmé cette semaine, lors du périple qui l'a mené à Aïn Témouchent, Batna et Biskra, faisant valoir les potentialités touristiques du pays. Cependant, cette volonté d'encourager le tourisme national ne se traduit pas sur le terrain. Et pour cause, les structures d'accueil font défaut que ce soit à travers les sites balnéaires, les stations thermales ou dans le sud du pays. Idem pour l'encadrement avec la déperdition enregistrée ces dernières années dans les métiers du tourisme. L'autre problème réside dans l'inadéquation des tarifs appliqués par les infrastructures existantes avec le pouvoir d'achat des citoyens. Pourtant, ce ne sont pas les idées qui manquent chez les investisseurs. Il y a d'une part ceux qui attendent l'aval des autorités pour l'extension de leurs infrastructures et, d'autre part, ceux dont les projets sont toujours en projet. Tout cela faute de plans d'aménagement touristique (PAT). Ces plans tant attendus, pour booster le tourisme au niveau local et contribuer à la création d'emplois, tardent à être élaborés et validés. Ils ont en effet enregistré un long retard. 10 SDAT sur 48 finalisés Les porteurs de projets s'en plaignent, d'ailleurs. Ces plans, faut-il le noter, dépendent des schémas directeurs de wilaya qui découlent, de leur côté, du schéma directeur d'aménagement touristique (SDAT) relevant également du schéma national d'aménagement du territoire (SNAT). En d'autres termes, le lancement des projets touristiques ne peut se faire sans le fonctionnement correct de toute cette chaîne SNAT-SDAT-PAT. C'est-à-dire sans un cadre stratégique de référence et sans une vision à long terme appuyée sur des objectifs clairs. Or, à l'heure actuelle, ni le SDAT ni les schémas de wilaya n'avancent au rythme souhaité. Le SDAT (à l'horizon 2030), qui est une composante du SNAT 2025, prévu par la loi 02-01 du 12 décembre 2001 relative à l'aménagement du territoire et du développement durable, patine. A ce jour, seuls 10 schémas de wilaya sur les 48 prévus ont été finalisés alors que 35 sont en phase d'élaboration et 3 autres attendent leur lancement, comme c'est le cas à Alger. C'est du moins ce que nous avons appris auprès d'un représentant du secteur, en marge de la visite d'inspection du ministre du Tourisme et de l'Artisanat dans la wilaya de Aïn Témouchent. «Nous avançons bien. Nous comptons finaliser les 48 projets durant la première année du prochain quinquennat en 2015», nous a précisé à ce sujet le directeur général de l'Agence nationale de développement du tourisme, Nedri Noureddine. Et dire que ces SDAT étaient prévus dans l'actuel programme. Mais ils n'ont pas été épargnés par le retard, tout comme d'autres projets sectoriels et à l'image de l'ensemble du programme quinquennal 2010-2014.Déjà l'année dernière, l'ancien ministre du Tourisme, Mohamed Benmeradi, avait relevé ces retards, appelant à accélérer le processus d'élaboration des SDAT. Le résultat est là aujourd'hui : des centaines de projets sont suspendus en l'absence de PAT. Exemple : un opérateur d'Oran, qui a été le premier investisseur privé à se lancer dans le tourisme thermal, attend toujours le PAT pour l'extension de sa station. «Notre projet d'extension est l'arrêt tout simplement parce que le PAT n'est pas encore prêt», nous a confoé à ce sujet M. Belazzoug de la chaîne New Beach. Difficile donc d'assurer, dans ces conditions, la montée en puissance du tourisme national et de l'insérer dans les circuits commerciaux du tourisme mondial, comme répété à chaque fois dans les discours officiels. Surtout quand les projets avalisés font face aux lenteurs bureaucratiques et aux difficultés financières. Dans ce cadre, faut-il rappeler l'appel lancé aux banques pour contribuer à lancer une dynamique dans le secteur. Le ministre du Tourisme a d'ailleurs relevé ce point à maintes reprises. Des banques privées pour financer les projets Le 10 février dernier, à l'occasion de la remise des autorisations d'investissement à 130 opérateurs pour des projets estimés à 183 milliards de dinars, M. Hadj Saïd a appelé les banques à participer «sérieusement» à soutenir le rythme de réalisation de ces projets «pour éviter tout retard ou suspension des travaux». «Il est même prévu de solliciter les banques privées à cet effet», selon le ministre, qui rappelle que 140 000 lits sont actuellement à l'arrêt. Il s'agit donc de ne pas tomber encore une fois dans le piège des projets retardés ou ajournés en prenant en considération le facteur financier, mais aussi en évaluant la maturation des projets avant de soumettre les dossiers aux banques en vue de bénéficier des crédits nécessaires. Ce que compte faire d'ailleurs Boukrif Farid, porteur d'un projet de réalisation d'une station touristique thermale, équipée d'un bloc médical de différentes spécialités, à Hassi Bahbah, dans la wilaya de Djelfa. D'un coût de 60 milliards centimes pour un délai de réalisation de deux ans avec la création de 80 emplois, ce projet sera financé à hauteur de 80% par la banque. «Nous espérons que les crédits seront alloués à temps. Sinon, cela impactera les délais de réalisation», nous dit à ce sujet M. Boukrif, pour qui le défi à relever est justement le respect des délais. «Pour l'heure, nous avons franchi un premier pas. Nous attendons la suite. Il est clair que allons être confrontés à des contraintes sur le terrain», ajoute-t-il. Cela pour dire que le parcours n'est guère facile pour un investisseur dans un secteur qui cherche à se construire pour apporter sa contribution à l'édification d'une économie indépendante de la rente des hydrocarbures, comme le dit cet autre investisseur de la wilaya de Aïn Témouchent qui a eu l'aval du gouvernement pour la construction d'un complexe touristique d'un coût global de 120 milliards de centimes.