Dans moins de 10 jours, va s'ouvrir la 47ème édition du festival du théâtre amateur de Mostaganem. Programmée pour la première fois de son existence avant les examens scolaires, cette manifestation sera, à en croire Abdallah Mebrek, le nouveau directeur technico-artistique, une occasion pour assurer une véritable transition vers plus de sérénité, plus de pédagogie, plus de convivialité, plus de vivacité. Selon ce responsable, par ailleurs actuel président de l'association Ichara, la prochaine édition servira de tremplin à une mouture plus avant-gardiste, avec une attention particulière à l'accueil des troupes et à la prise en charge des représentants de la presse qui vont disposer de toutes les commodités et de toutes les attentions. Insistant particulièrement sur les travaux en continu qui se dérouleront au niveau du complexe touristique El Mountazah à Sablettes plage, l'orateur annoncera le retour du débat post-spectacle ainsi qu'une conférence de presse qui sera animée par le metteur en scène et deux acteurs de la troupe. Des ateliers à ciel ouvert seront confiés à des animateurs qui pourront être reconnaissables grâce à un badge et pourront ainsi être sollicités par les jeunes acteurs amateurs sur tous sujets en rapport avec le 4ème art, comme la scénographie, le décor, la mise en scène. Ces contacts feront l'objet d'une évaluation écrite de la part des animateurs, ce qui alimentera le fonds documentaire du festival qui en a bien besoin. Lors de la conférence de presse, le président et les membres de la commission de sélection qui viennent de jalonner le pays, ont présenté devant la presse – une première – un compte-rendu de leurs travaux. C'est ainsi que l'on apprendra que pour cette édition, seront appelées à se produire 7 troupes, à raison d'un seul spectacle par soirée, ce qui devrait alléger fortement le travail des journalistes et autres gens des médias dont la participation pourrait dépasser tous les espoirs des organisateurs. Lors du long et passionné débat ayant suivi la conférence de presse, le réalisateur Ahmed Belalem, encore auréolé de son prestigieux premier prix ramené du festival de Sidi Bel Abbès – où il a interprété, pour la première fois devant un public algérien, selon les bons mots de Mekki Bensaïd – aura fait une intervention remarquable de lucidité et de courage. En effet, évitant à dessein le langage de la métaphore, Belalem dira crûment combien la survie du théâtre professionnel dépend, de manière cruciale et décisive, de la bonne santé du théâtre amateur. Rôle de catalyseur Le regard pétillant, les sens en éveil, le talentueux metteur en scène dira sans complaisance l'impérieuse nécessité pour le festival amateur de Mostaganem de persister dans son rôle de catalyseur de la scène culturelle nationale dont il est et restera l'unique «fertilisateur». Il rappellera avec force les similitudes entre le festival d'Avignon et celui de Mostaganem, des similitudes que les années et les mauvaises habitudes auront fortement atténuées, puisque lorsque le festival d'Avignon aligne à chaque édition pas moins de 500 troupes et autant de spectacles, le nôtre parvient à peine à présenter une dizaine de pièces. Ce malheureux parallèle devrait, ajoutera-t-il, presque au bord de la déprime, nous inciter à plus de vigilance et à plus de présence, sans quoi, il en sera fini de notre festival et il en sera fini de notre culture. Pour Ahmed Belalem, «sans la pépinière de la sphère amateur, il n'y a point de salut» ; rappelant à la rescousse les statistiques, il soulignera que «même durant la décennie noire du terrorisme, il y avait 3 fois plus de troupes amateurs qu'aujourd'hui». De son côté, Rachid Djerorou, le commissaire du festival prendra la parole pour souligner «combien est lourde la tâche de présider à cette manifestation dont les racines plongent dans les tréfonds de la mémoire collective et qui, à chaque instant, nous interpelle quant à nos responsabilités vis-à-vis de la culture». Se voulant pédagogue, il dira sa certitude «qu'avec l'arrivée de jeunes universitaires à qui seront confiées les tâches de préservation et d'approfondissement de la réflexion sur les rôles passés et à venir du premier festival culturel algérien, ce sont là les prémices concrets d'un rajeunissement irréversible». A l'intention des présents, Rachid Djerourou rappellera sans détours que sa nomination à la tête du nouveau théâtre de Mostaganem date d'à peine deux mois et qu'à ce titre, sans vouloir occulter ses responsabilités, «je demande juste qu'on prenne un peu de recul avant de parler du bilan». En réponse aux implorations incantatoires de Belalem qui en appelait à «secourir le théâtre amateur du naufrage annoncé», c'est de concert que le commissaire et le directeur artistique tendront la main et l'oreille à l'enfant terrible du 4ème art mostaganémois, afin qu'il rejoigne «la caravane du festival» et «qu'il mette fin à la posture en retrait si confortable», lorsqu'on est loin du brasier. Une invite qui ne restera pas sans suite lorsqu'on connaît la rage avec laquelle ce metteur en scène exigeant se met à l'ouvrage. Selon un journaliste chevronné, c'est bien la première fois, depuis des lustres, qu'une conférence préliminaire se déroule dans un climat aussi tendu et aussi prolixe, ce qui augure des jours besogneux qui attendent la lourde machine du festival.
