Adossés au mur, attablés dans les deux seuls cafés maures de la localité ou flânant par groupes dans les rues, les jeunes de Tibouamouchine n'ont guère d'autres choix. L'aire de jeux de proximité créée durant les années 1980, qui leur a permis d'organiser à pareille époque des tournois interquartiers, se dégrade au fil des ans. Aujourd'hui, le terrain est raviné par les eaux d'un cours d'eau dont les débordements en hiver ont favorisé aussi la poussée d'herbes folles. L'absence d'une clôture a donné libre accès à des casseurs qui ont démoli totalement les vestiaires. Devant ce gâchis, les autorités locales n'ont pas pu venir à la rescousse d'une population juvénile désemparée, en l'absence d'une délibération et d'une enveloppe financière à même de rendre praticable leur terrain fétiche. Un « malheur » ne venant pas seul, le tableau est complété par les cybercafés qui, devant servir d'espace de distraction et de savoir pour cette jeunesse, ont fermé leurs portes, au grand dam des amoureux du Net, en 2001 suite au vol des câbles téléphoniques du réseau principal alimentant la localité. Depuis cette date-là, le moins que l'on puisse dire, le combiné n'a pas sonné pendant de longues années et Tibouamouchine était restée coupée du reste du monde. Les jeunes adeptes du virtuel, qu'il vente, qu'il pleuve ou qu'il fasse chaud, ont été contraints de se rendre dans la ville de Seddouk pour pouvoir surfer sur la grande toile. Ce n'est qu'en 2005 que le téléphone par ondes, le WLL, a fait son apparition, pour desserrer un tant soit peu l'étau, et que les anciens abonnés ont retrouvé le sourire après que l'Actel leur ait offert des appareils. Mais rien n'est venu en direction des jeunes qui attendent impatiemment le rétablissement de la connexion et la réouverture des cybercafés de la localité. Aujourd'hui, seuls deux habitants du village ont pu bénéficier d'appareils flashés permettant d'accéder à l'Internet. Et encore, l'on est loin d'être satisfait et on crie même à l'arnaque du fait de la faiblesse de l'offre. « La connexion fonctionne avec un débit très faible. Il est quasiment impossible de faire monter une page quelconque », se révolte un abonné insatisfait. Pour le reste des demandeurs de ces appareils, qui espèrent toujours le dégel de la situation, les services de l'Actel d'Akbou leur répondent, à chaque fois, qu'ils sont en rupture de stock. Du côté des jeunes, on n'en démord pas pour autant. Pour évacuer le stress et se divertir durant les grandes vacances, il reste tout de même une alternative. Ils préfèrent attendre l'arrivée du mois de juillet pour entamer des excursions vers la plage et goûter au plaisir de la grande bleue. Pour ceux qui n'ont pas les moyens de le faire individuellement, chômage oblige, ils louent collectivement des fourgons pour aller passer des journées de détente sur les plages de la wilaya de Béjaïa.