Ses yeux brillaient et la joie se lisait sur son visage lorsqu'il mettait ses quelques meubles dans le camion pour rejoindre son nouveau F3 dans la nouvelle ville de Chaïbia, dans la commune de Ouled Chebel. Dahmane, quinquagénaire et «taxieur» clandestin, vivait avec ses six enfants, sa femme et sa sœur dans une maison de fortune aux abords de l'oued El Aggar, dans la commune de Zéralda. Recensé plusieurs fois et après une attente de près de vingt ans, il bénéficie enfin d'un logement social. De l'autre côté, la déception s'abat sur des centaines de familles qui vivent dans l'extrême précarité. Hassina en est un malheureux exemple. Cette sexagénaire vit avec sa fille et ses deux garçons à Djebel Koukou sur les hauteurs de Bouzaréah. Dans sa petite maisonnette qui lui servait de gîte, elle vivote dans une extrême précarité au milieu de tous les dangers qu'impose la forêt. Pourquoi n'est-elle pas concernée par le relogement ? La réponse est simple : elle et ses 1000 voisins sont loin des yeux des autorités. D'autant plus qu'ils n'occupent pas un terrain qui intéresse la mafia du foncier. Que ferait-on d'un terrain cabossé où des glissements y sont déplorés chaque jour ? La preuve : tous les sites considérés comme prioritaires de ce large programme de relogement sont situés sur de plateformes bien plates et proches des axes routiers. Entre la langue de bois et la sincérité officieuse de certains responsables, les déclarations vont dans tous les sens. Pour justifier cette sélection, le wali d'Alger, M. Zoukh, déclare qu'Alger manque d'assiettes foncières et qu'il faut absolument récupérer ces terrains occupés illicitement par ces «bidonvillois». En même temps, il donne la priorité dans cette grande opération de recasement aux familles qui vivent dans l'exiguïté et souffrent en silence. Viennent ensuite ceux des immeubles menaçant ruine, des bidonvilles et des chalets. Ceux de Djebel Koukou ne souffrent-ils pas en silence depuis plus de vingt ans ? Pour sa part, Mohamed Rehaimia, directeur général de l'OPGI d'Hussein Dey, gestionnaire du site de recasement sis à Chaïbia, a déclaré à l'APS que la priorité revient aux familles dont les baraques sont proches de la cité et celles qui occupent des terrains pouvant être destinés à d'importants projets en souffrance. Sur les lèvres des présidents d'APC et autres responsables, un seul mot revient à chaque fois : patientez ! A qui sait attendre, le temps ouvre ses portes. Hassina, ses compagnons de misère et tous ceux qui leur ressemblent n'espèrent ne voir qu'une seule porte s'ouvrir : celle d'une habitation décente.