«Ecrire, c'est se souvenir. Mais lire, c'est aussi se souvenir.» Mauriac. Par l'intermédiaire d'«El Malek Jibril» (l'ange Gabriel), que le salut soit sur lui, le premier verset du Saint Coran révélé par Allah, le Dieu des musulmans, à notre Prophète Mohamed, que la Prière et le Salut soient sur Lui, est l'ordre ou l'impératif de la lecture : «Lis au Nom de Dieu Qui a Créé» (Sourate 96, El Allak). Dans cette contribution, il ne s'agit pas d'écrire sur la lecture culturelle, la façon civilisée de vivre dans un milieu culturel de haut rang, mais sur l'acte de lecture pédagogique à l'école.Au moins trois articles sont parus dans un quotidien national et sont dédiés aux bibliothèques,(1) à un salon de livres(2) et à une description de la lecture chez nos étudiants.(3) Dans sa conclusion, la dernière auteure se demandait si les étudiants, cette locomotive de la société, comprendront enfin que s'instruire et se cultiver vont de pair. En lisant un article, un texte, un livre, un roman, un polar, etc. on a sûrement le sentiment de partager avec l'auteur une intimité, une détresse parfois décrite en détails, des émotions, un rêve, etc. C'est le témoignage récent d'un universitaire dans la presse qui a reconnu de ses lectures que l'auteur à travers ses contributions est si sincère et si éprouvé par l'état lamentable de notre système éducatif en général et de notre université en particulier. 1. De la lecture L'activité de lecture est indispensable à la maîtrise de l'écriture et à celle de l'orthographe car elle fournit, en situation, des représentations des normes écrites. L'apprentissage de la lecture est une reconnaissance sociale, culturelle et professionnelle. Il y a même une joie de savoir lire et écrire. La lecture met en jeu l'œil qui effectue les mouvements de progression, de fixation et de régression. On lit pour s'informer, pour écrire et répondre, pour analyser un écrit, pour se documenter. La lecture est visuelle, silencieuse, orale ou à haute voix. Lire consiste à reconnaître en quelques secondes une suite de signes graphiques auxquels le lecteur donne un sens à partir des connotations tenues en mémoire. Le lecteur doit avoir des compétences linguistiques. La lecture doit être agréable. On doit lire ce qui est utile, et exploiter plutôt ce qu'on lit. La vitesse de lecture d'un bon lecteur est nettement supérieure à celle de la lecture orale ou au débit d'articulation pour une langue donnée. De 130 à 150 mots/minute, de 390 à 450 mots/minute sont respectivement la vitesse d'articulation et la vitesse d'un bon lecteur en «français».(4) De 95 à 105 mots/minute, de 285 à 315 mots/minute sont respectivement la vitesse d'articulation et la vitesse d'un bon lecteur en «arabe». En mettant en valeur visuellement les informations, les jeunes arriveront sûrement à lire beaucoup . 2. Les méthodes de lecture chez les élèves Dès l'âge de deux ans, l'enfant acquiert l'usage de symboles qui est la capacité d'utiliser des ensembles différenciés et conventionnels de signes pour s'exprimer. Cette fonction symbolique se construit jusqu'à l'âge de 7 ans par le développement du langage, du jeu, de l'imitation, du dessin. 2.1. Méthode : «Sons contre lettres» Cette méthode utilise les sons contre les lettres. En France, depuis les années 50, les instituteurs appliquaient, pour des raisons idéologiques obscures, la méthode globale, ou semi-globale, plutôt que la méthode traditionnelle, dite syllabique, qui a pourtant fait ses preuves chez plusieurs générations d'écoliers. La méthode syllabique va du simple au complexe. C'est d'abord l'étude des lettres qu'on associe ensuite en phénomène (b, a, ba), pour former des mots, puis des phrases. Quant à la méthode globale, elle procède par une décomposition postérieure de l'acquisition globale de la phrase, c'est-à-dire qu'on apprend d'abord à entendre les divers sons qui la composent, pour ensuite les disséquer un à un. 2.2. Méthode à inspiration égyptienne Cette méthode a deux graves inconvénients, souvent dénoncés par les parents et les pédagogues avertis. Une fois le son enregistré, l'enfant s'estime satisfait et ne se préoccupe plus de savoir comment il s'écrit. Ainsi, quand il entend le son «dan», il l'écrira, au hasard, dent, dans ou dant. Les élèves formés à cette méthode remettent des copies d'examens truffées de fautes d'orthographe. Faute d'un apprentissage des lettres et des phonèmes, l'enfant sujet à la dyslexie verra ses troubles s'aggraver. Expérimentée avec succès dans les années soixante-dix, la méthode Bordesoules facilitait l'apprentissage de la lecture à l'école primaire des élèves «normaux» et des élèves atteints de dyslexie, des élèves qui ont tendance à lire de travers.(5) Elle est une variante de la méthode syllabique qui consiste à habiller chaque lettre du mot étudié avec un dessin représentant un objet ou un personnage, et à raconter une histoire en suivant l'ordre. Pour suivre la logique de l'histoire, l'enfant est donc obligé de lire des lettres dans le bon ordre, ce qui l'amène à lire et écrire le mot correctement. La méthode s'apparente à l'ancien égyptien, où les mots sont imagés par des pictogrammes. Dès qu'on ignore le sens de l'un de ces signes, la phrase devient incompréhensible. 2.3. La lecture des écoles coraniques Pour apprendre le Coran, dans les mosquées et les écoles coraniques, la lecture se fait à haute voix et tôt dans la journée. C'est une lecture qui mémorise les sons. Il est préférable de repérer auprès des enseignants des premiers cycles de l'éducation toutes les méthodes de lecture aux résultats probants et de les proposer aux autres enseignants pour adoption éventuelle sans contraintes. 3. De l'accommodation dans l'acte de lecture Selon Pascal, trop de distance et trop de proximité empêche la vue. L'accommodation est l'un des deux mécanismes de l'adaptation de la pensée aux caractéristiques d'une réalité intérieure ou extérieure par rapport à l'individu ou un groupe pensant. C'est une activité visant à approprier, à conformer la relation individu-réalité intérieure ou extérieure aux données et conditions de cette réalité. On dira par exemple qu'un élève s'accommode bien aux mathématiques modernes.(6) Si l'accommodation, l'adaptation de l'œil aux diverses distances de vision est véritablement responsable de la myopie, on ne comprend pas pourquoi les personnes qui passent des heures devant la télévision, lisent des journaux et des livres, ou bien sont devant l'écran de leur microordinateur, ne sont pas toutes myopes.Les enfants occidentaux penchés sur leurs cahiers deviennent souvent myopes. A Vanuatu, petit archipel du Pacifique, où il n'y a à voir que le ciel et la mer, pas un seul myope ! Les seuls moments où ces personnes s'accommodent, c'est lorsqu'elles réparent leurs filets de pêche, ou quand ils regardent le poisson au fond de leur écuelle. Avec la télévision et la lecture, le monde moderne fait à l'homme des yeux toujours plus grands, toujours plus myopes. C'est parce que la rétine, et non le cerveau, «voit» des images floues et cherche à «mettre au point», en ordonnant à l'œil de s'agrandir, donc de devenir myope. A Taïwan, la majorité de la population locale souffre de myopie. Les jeunes enfants commencent à apprendre les idéogrammes et la calligraphie dès l'école maternelle. Les Lapons du nord de la Finlande passaient plus de temps à contempler les lointaines aurores boréales qu'à observer de près les pierres ou les lichens ; aujourd'hui, ils vont à l'école et apprennent à lire, bref ils doivent accommoder.(7) Conclusion : Augmenter la taille des classes, accroître la charge de travail des enseignants, recruter des personnes non ou peu formées ou sur la base de contrats qui ne leur offrent pas la sécurité de l'emploi tels les contractuels, risquent de dévaloriser encore davantage la profession d'éducateur, la mission de lecture, et laisse les enseignants démunis face aux réalités de la classe ou les démotive. L'éducation moderne a produit de grands efforts pour encourager l'esprit inventif, mais elle a encore bien du chemin à faire avant de pouvoir se débarrasser complètement de son instinct à réprimer la créativité telles la lecture et l'orthographe. La lecture change selon les conceptions du monde. Comme le rappelle l'historien Alain Corbin : «Un paysage est d'abord une lecture». On peut s'interroger sur les moyens institutionnels et conditions sociales qui permettent à la lecture de se perpétuer dans l'inconscience heureuse de ceux qui lisent. Réduire le rapport de lecture à un pur rapport de communication, ce serait interdire de rendre compte des caractéristiques spécifiques qu'on doit à l'enseignant. La manière de développer la lecture et de la perpétuer se fait dans ce qui est acquis sous la forme persistante de la lecture. De nos jours, il faut maîtriser sa vie sociale en sachant lire, écrire, compter, calculer, utiliser un ordinateur et en sachant chercher des informations sur Internet. Donc, lire est impératif et primordial !