J'ai honte d'être Algérien.» Sur la Toile, les Algériens se lâchent et n'ont pas peur des mots. L'indignation est forte. La colère et la culpabilité le sont encore plus. La mort d'Albert Ebossé a secoué les Algériens et animé un sentiment de honte collective. Les messages de condoléances sont nombreux mais au-delà de l'indignation, dans la grande majorité des messages, l'autoflagellation se nourrit de haine de soi, de désenchantement et de dépit. «Où va l'Algérie ?», «Il faut arrêter le foot dans ce pays», «La jeunesse algérienne est devenue monstrueuse», «Il faut arrêter le championnat et fermer tous les stades, nous ne méritons pas le foot», «Peuple de sauvages», « Ce pays part à la dérive» «L'Algérie déshonorée», «Quand est-ce que ce peuple va enfin s'éduquer ?», «Honte à nous ! Arrêtons le foot et fermons les stades»... Pour beaucoup, cet événement dramatique qui n'aurait jamais dû se produire est une raison de plus d'«avoir honte d'être algérien». Que ce sentiment de culpabilité se justifie ou non, sur les réseaux sociaux, facebook, twitter et autres, les commentaires se suivent et se ressemblent. Les Algériens se sentent coupables de cette violence dans laquelle s'est enfermée la société, sans pouvoir se l'expliquer. «Un peuple d'excès et de délire qui ne connaît rien sauf sa liberté déchainée. Une fois de plus l'Algérie est pointée du doigt dans la presse internationale pour des actes cataclysmiques. En dénombrant les pertes humaines dans toutes les catégories confondues, on aurait dit que l'Algérie fait la guerre à elle même et fait autant de morts que dans la bande de Ghaza. La sanction devrait être sévère pas seulement pour le concerné mais pour tout le peuple !» s'insurge un internaute. Le fait que le joueur tué soit étranger exacerbe l'indignation. Tout de suite après l'annonce du décès du joueur, plusieurs pages ont été créées sur facebook pour dénoncer l'acte mais aussi pour réclamer la suspension du championnat. «Chaque Algérien conscient de la situation actuelle dans les stades du pays doit boycotter les stades, les matchs à la télé, et mêmes les journaux sportifs», est-il écrit sur la page «Boycottons le championnat Algérien». Une autre page réclame «l'arrêt définitif du football en Algérie». D'autres groupes organisent sur internet des rassemblements pour rendre hommage au défunt joueur. «A la mémoire d'Albert Ebossé, nous demandons à tous ceux qui sont contre la violence dans les stades et à tous ceux qui ont été frappés par ce qui est arrivé à Albert d'être présents le 30 août prochain à l'entrée du stade de Tizi Ouzou à 10h pour une minute de silence en sa mémoire.» C'est la première fois qu'un joueur est tué par la frénésie des supporters. Une internaute se montre particulièrement virulente, en imputant la responsabilité de la mort d'Albert Ebossé à l'Etat : «Vous avez fabriqué des zombies à force de déni de cette jeunesse, de matraquage pseudo-religieux, de démantèlement du système éducatif, de banalisation de la violence, de musellement des forces vives et de l'intelligence. Vous avez encouragé l'impunité, la médiocrité et le fanatisme. Vous avez laissé faire le racisme, la xénophobie et le sexisme. Vous avez encouragé le nivellement vers le bas. Vous avez criminalisé la parole libre... La liste est non exhaustive. Hier j'avais honte. Plus aujourd'hui, car je ne me reconnais pas en vous, je ne suis pas votre produit. Je le refuse. Je n'ai pas honte car je ne suis pas vous. Vous devriez avoir honte. Vous êtes la honte de ce pays. A tous les responsables de cette débâcle. Je ne pardonnerai pas.» Une mort qui agit comme un électrochoc…