Le rapport de Michael Garcia, ancien procureur du district new-yorkais, sur les conditions d'attribution des Coupes du monde 2018 (Russie) et 2022 (Qatar) commence à faire désordre au niveau de la FIFA… qui lui avait commandé ce travail. Il faut croire que beaucoup d'acteurs importants au sein de l'exécutif de la FIFA ne sont pas chauds pour que le contenu du rapport soit divulgué et porté à la connaissance de l'opinion publique, qui l'attend avec impatience. Le 20 septembre 2014, le juge américain a remis son rapport de 430 pages et 200 000 pièces à conviction au juge allemand Hans Joackim Eckert, président de la chambre de jugement et commission d'éthique de la FIFA, dans la perspective qu'il soit rendu public au lendemain de la réunion du comité exécutif de la FIFA qui s'est tenue les 24 et 25 septembre dernier. En fin manœuvrier, le président de la FIFA, Joseph Sepp Blatter, a différé sa publication, arguant qu'«aucun membre du comité exécutif et encore moins les onze survivants qui ont voté le 2 décembre 2010 en faveur de la Russie (2018) et du Qatar (2022) n'a demandé la publication du rapport». Le juge américain, averti des intentions de Blatter avant le début de la réunion du comité exécutif, s'est rapidement démarqué de celui qui était allé le chercher aux Etats-Unis, sur recommandation d'un ponte d'Interpol, pour lui confier la mission de faire la lumière sur les officiels FIFA qui ont manqué au code de l'éthique de l'institution. Le premier jour de la réunion du comité exécutif, le juge Michael Garcia a publiquement réclamé la publication de son rapport. L'enquête, qui a duré des mois et coûté 5 millions d'euros à la FIFA, risque d'être tronquée. De report en report, sa publication pose problème et fait désordre, à 7 mois de la réélection de J. S. Blatter au poste de président. Ce qu'il faut savoir, c'est que le juge Garcia a remis le rapport en quatre exemplaires avec un mot de passe crypté. Quatre personnes seulement ont accès au code. Aucun des 27 membres du comité exécutif de la FIFA ni Blatter n'a lu ce rapport dont une partie, concernant la Russie, n'a pas été l'œuvre de Michael Garcia, persona non grata en Russie suite à la condamnation du trafiquant d'armes russe, Viktor Bout… par le juge Garcia. D'après des sources proches de la commission d'éthique de la FIFA, «le rapport Garcia n'évoque nullement le retrait à la Russie et au Qatar de l'organisation des Coupes du monde 2018 et 2022. Il a stigmatisé les dysfonctionnements au sein de la FIFA, pointé du doigt les ‘lobbystes officiels et facilitateurs relationnels aux méthodes douteuses' qui ont leurs entrées dans la ‘maison de verre' zurichoise». Les survivants du comité exécutif qui ont voté en décembre 2010 manœuvrent en coulisses afin que le rapport Garcia ne soit pas publié, ou du moins partiellement. J. S. Blatter s'est rangé de leur côté et fait tout pour saborder le travail du juge américain. La publication du rapport, prévu avant le début de la Coupe du monde 2014, a été reportée à plusieurs reprises et nul ne sait si un jour il sera effectivement porté à la connaissance de tous. Début novembre prochain, Hans Joacquim Eckert dira si le juge Garcia a respecté ou non toutes les procédures. Une manière d'ouvrir la porte à un autre renvoi qui fera l'affaire de tous ceux que ce rapport risque de déranger. A commencer par son premier commanditaire et patron du football mondial.