La controverse Sadi et ses détracteurs a commencé après la conférence-débat animée à Sidi Aïch par l'ancien patron du RCD. Les interventions de Saïd Sadi sur l'histoire et ses dernières déclarations, rapportées par des médias, sur les parcours historiques d'Ahmed Ben Bella, Ali Kafi et Messali Hadj, prennent une nouvelle tournure. Le débat qu'il souhaite ouvrir sur l'histoire de l'Algérie risque de le conduire devant les tribunaux. En effet, le parquet d'Alger vient de s'autosaisir et d'ouvrir une information judiciaire contre lui. «Le procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed a requis, conformément à la loi, l'ouverture d'une information judiciaire contre Saïd Sadi, du chef de diffamation», a annoncé le parquet dans un communiqué rendu public hier. Pour le procureur, les déclarations de Saïd Sadi «portent atteinte à l'honneur de ces trois personnalités». L'ouverture de l'information judiciaire intervient «suite aux informations rapportées par certains médias, relatives aux déclarations faites par Saïd Sadi lors d'une conférence-débat qu'il a animée à Sidi Aïch (Béjaïa), au cours de laquelle il a imputé à l'ex-chef d'Etat, feu Ahmed Ben Bella, et à l'ex-chef d'Etat, feu Ali Kafi, ainsi qu'à la personnalité nationale et historique, Messali Hadj, des faits portant atteinte à leur honneur et à leur considération», lit-on dans le même communiqué. Cette décision, explique également le procureur de la République, a été prise «compte tenu du fait que ces propos rendent leur auteur passible de poursuites pénales pour diffamation». «Le délit de diffamation est consommé dès lors que les propos diffamatoires ont été rendus publics et que cette publicité donne compétence à tout tribunal dans le ressort duquel l'accès aux faits incriminés est rendu possible», ajoute le parquet. L'histoire : Une question sensible Invité, vendredi dernier, pour animer une conférence-débat à Sidi Aïch, dans la wilaya de Béjaïa, Saïd Sadi a évoqué le parcours des trois hommes en question durant la guerre de Libération nationale. En réponse à des questions du public, selon les comptes rendus des titres de la presse nationale, l'ancien leader du RCD aurait affirmé que «Ben Bella était un agent de Fehi Dib, patron des services secrets égyptiens à l'époque». Concernant Ali Kafi, Saïd Sadi précise que «celui-ci, qui n'a jamais été congressiste à Ifri en 1956 (Congrès de la Soummam), était aveuglé par la haine antikabyle. Cela relève du pathologique». S'agissant de Messali Hadj, le conférencier aurait aussi déclaré qu'«il a été choqué lorsque l'aéroport de Tlemcen a été baptisé au nom de Messali, qui a pourtant dirigé un mouvement armé contre l'ALN durant la Révolution». «Ce n'est rien d'autre qu'une prime à la trahison. Je suis tout autant choqué par l'attitude de l'ONM, qui s'est murée dans un silence, après que le président français, François Hollande, ait déclaré, lors de sa visite à Tlemcen, qu'il était temps de réhabiliter Messali. J'ai écrit à François Hollande pour lui demander ce qu'il penserait si j'appelais la France à réhabiliter le maréchal Pétain». Ces déclarations suscitent depuis le début de la semaine un véritable tollé. Plusieurs réactions, en plus de celle du parquet d'Alger, ont été enregistrées, rappelant ainsi l'extrême sensibilité de la question de l'histoire nationale. Truffé de zones d'ombre et maintenu sous embargo officiel, ce patrimoine national donne souvent suite à des polémiques. Depuis la sortie de son livre sur le colonel Amirouche intitulé Amirouche : une vie, deux morts, un testament, Saïd Sadi s'est retrouvé dans un véritable tourbillon. Des anciens du MALG (ministère de l'Armement et des Liaisons générales durant la Révolution), ancêtre du DRS, l'ont violemment chargé. A travers des contributions publiées dans la presse nationale et dans des conférences, ces derniers tentent de «démentir le contenu du livre en question» et de défendre Abdelhafid Boussouf et l'ancien président, Houari Boumediène, accusés d'être, respectivement, à l'origine de la mort et de la séquestration des ossements de Amirouche et Si El Houès. Visiblement, la polémique ne s'estompera pas de si tôt...