Si le département de l'Energie s'appuie la voracité du marché domestique pour justifier le plan de développement des hydrocarbures non conventionnels, l'argument peut s'avérer, dans une certaine mesure, pertinent. S'il est vrai que la demande interne demeure, à bien des égards, en deçà de la moyenne mondiale en la matière, celle-ci pose un certain nombre de problèmes. Si la demande interne dispose encore d'une certaine marge de progression, comme l'a souligné le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, il y a quelques mois, la consommation sur le marché domestique n'est nullement tirée par les besoins du secteur industriel, comme c'est le cas des économies développées, mais par le réseau de distribution public. Aussi, la demande interne commence à peser sur le niveau des exportations. Ainsi, selon les chiffres publiés récemment par Sonatrach, les volumes d'hydrocarbures commercialisés par la compagnie nationale sur le marché interne ont augmenté globalement de 4% entre 2012 et 2013, tirés essentiellement par les produits raffinés et bitumes ainsi que par le gaz naturel. En parallèle, les volumes exportés ont décliné de plus de 6,6% sur la même période. Pis encore, l'Algérie a importé 5 millions de tonnes de produits énergétiques durant l'année 2013, essentiellement des essences et du gasoil. La situation actuelle du marché n'augure d'ailleurs d'aucun ralentissement du rythme de consommation interne. D'après les chiffres énoncés il y a quelques mois par Youcef Yousfi, la consommation actuelle du marché domestique est estimée à 55 millions de tonnes équivalent pétrole (tep) et atteindra 100 millions de tep en 2030, soit l'équivalent de 80 milliards de dollars en valeur. Les besoins vont crescendo Plus en détail, le ministre de l'Energie a estimé que nos besoins en gaz naturel passeraient de 30 à 100 milliards de mètres cubes à la même échéance. Les besoins en carburants devraient quant à eux passer de 15 à 50 millions de tonnes à l'horizon 2040. Des prévisions assises sur l'hypothèse d'une accélération de la demande à un rythme de 5% par an. Or, la demande du marché domestique a inscrit un rythme de croissance annuelle à deux chiffres ces dernières années. Un rythme qui devrait se maintenir au cours des prochaines années vu que la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (CREG) table sur une hausse variant entre 4,3 et 7,1% chaque année de la demande en gaz à l'horizon 2019. Le même organisme s'attend à un accroissement de 4,5 à plus de 11% de la demande annuelle d'électricité à l'horizon 2023. Ce qui induira forcément des investissements faramineux que Sonatrach et Sonelgaz vont devoir consentir afin de satisfaire les besoins. Cependant, au-delà de la question de disponibilité des ressources, du nécessaire renouvellement de la base de réserves et du débat contradictoire sur l'exploitation des hydrocarbures de schiste, se pose aujourd'hui avec acuité la gestion des ressources du pays. L'ampleur des subventions implicites à l'énergie, qui représentent 11% du PIB, ne favorise pas l'efficacité énergétique, mais bien le gaspillage de l'électricité et du gaz ainsi que la contrebande et le trafic de carburants. Pis, sous couvert de l'avantage concurrentiel du marché algérien, la subvention aux prix du gaz cédé sur le marché intérieur aux industries de transformation des hydrocarbures a permis l'exportation de ressources précieuses sans que cela permette de contribuer de manière significative à la création de valeur ajoutée.