La facture énergétique de l'Algérie atteindra en 2030 quelque 80 milliards de dollars, soit une augmentation de 50% par rapport à la consommation actuelle. Ce chiffre communiqué, hier, par le Premier ministre par intérim, M. Youcef Yousfi à l'ouverture de la 18e Journée de l'énergie, renseigne sur les défis énergétiques qui attendent le pays à moyen terme. Yousfi n'a pas manqué d'ailleurs de souligner les mutations que connaît le pays en termes de consommation énergétique, actuellement en hausse de 7% par an et une facture qui s'alourdit davantage. En 2013, le pays a consommé près de 40 milliards d'énergie soit 55 millions de tonnes équivalent pétrole (tep). Mais face à cette situation, Yousfi a tenté de relativiser affirmant que le pays continuera sa politique de subvention des prix de l'énergie sans toutefois écarter une révision à la hausse des prix à moyen terme. «Les tarifs bas est une décision politique prise pour favoriser le développement social du pays (...) bien entendu cette situation ne peut pas durer éternellement», a-t-il souligné sur ce point. Avant d'ajouter qu'une éventuelle révision à la hausse des niveaux des tarifs devrait se faire «d'une manière progressive et rationnelle» et «en tenant compte du pouvoir d'achat des citoyens». Mais en attendant une probable révision des prix, le Premier ministre par intérim a jugé utile de rappeler la nécessité d'aller vers une transition énergétique. Celle-ci se fera avec une contribution de 30% d'électricité produite à partir des énergies renouvelables, et en jouant sur l'économie de l'énergie et l'optimisation des énergies fossiles. Le tableau dépeint par le Premier ministre illustre ainsi les craintes et les inquiétudes des responsables et spécialistes des questions énergétiques. Ainsi, Mustapha Mékidèche, vice-président du Cnes, n'a pas mâché ses mots en se prononçant pour une augmentation des prix de l'électricité et du gaz. Le Pr Chems Eddine Chitour estime, quant à lui, qu'il y a urgence de remettre de l'ordre dans le secteur et d'encourager l'économie d'énergie. Le pays a la capacité de réduire de 20% sa consommation en électricité et gaz, estime l'universitaire qui rappelle que pour uniquement l'importation du carburant, le pays débourse 3 milliards de dollars. Chitour plaide aussi pour la rationalisation de la consommation d'électricité et la réduction du train de vie des structures de l'Etat. Pour les subventions, il a fait remarquer que 80% du soutien étatique bénéficie aux riches. Pour la question de l'exploitation du gaz de schiste, l'universitaire s'est dit contre cette option. Un avis qui n'est pas partagé par l'ancien P-dg de Sonatrach, Abdelmadjid Attar, lequel juge que «si on a à choisir entre le sable et le gaz, on choisirait le gaz». Néanmoins, ce dernier pense que le problème se pose beaucoup plus au niveau du volume récupérable qui ne pourrait dépasser 20% des réserves prouvées. S'agissant de la demande interne, Attar a relevé, lui aussi, la fragilité du modèle actuel. Plaidant pour une transition énergétique, l'ancien P-dg de Sonatrach prévoit un scénario pessimiste pour le pays avec, à la clé, une hausse fulgurante de la consommation et une baisse drastique des exportations à partir de 2030. S. B.