Si la tenniswoman algérienne, Inès Ibbou, poursuit aujourd'hui son ascension vers le sommet, il faut savoir qu'elle est passée par le Midoun Tennis Academy. El Watan Week-end tente de faire un éclairage sur cette école de formation. Lundi 22 juin 2015. Il est 16h45. La température dépasse largement les 30 degrés en ce cinquième jour du mois sacré de Ramadhan. Deux parents qui ont accompagné leurs enfants restent bien à l'ombre en suivant l'entraînement de leur progéniture. Le manager Zine Abidine Midoune, lui, prodigue déjà des conseils à la petite Lina, âgée d'à peine six ans sur le premier court de tennis. Son frère se démène dans tous les sens sur l'autre court pour commencer l'entraînement avec les gamins qu'il a sous sa coupe. Ça se passe souvent comme ça au Midoun Club de Tennis, au centre d'Azur plage de Staouéli. Il a fallu une sacré dose de courage et une grande détermination aux deux frères Zine Abedine et Walid, qui avaient décroché leurs diplômes en France afin de s'installer en Algérie et lancer leur école de tennis. C'était même un pari risqué, surtout que le pays est loin d'être une terre du sport de la raquette. Mais les Midoun croyaient dur comme fer en leur projet. «On a discuté, mon frère et moi du projet de monter quelque chose en Algérie, surtout que nous avons un potentiel jeunes très important. Nous avions notre méthode de procéder et on savait que ça pouvait marcher», dira Zine Abidine Midoun avant d'ajouter : «Dans les années 70', le sport algérien se portait mieux parce qu'au-delà de la formation, il y avait aussi la détection. Aujourd'hui, on n'entend plus parler de détection nulle part. Conscients que le tennis n'est pas un sport populaire, nous avons décidé d'aller chercher nous-mêmes les joueurs.» Le début de l'aventure a été loin d'être une partie de plaisir. En effet, après avoir tenté de lancer leur projet à Blida à la fin de l'année 2004, les deux frères ont vite déchanté en raison de divergences d'idées avec les responsables sportifs du club blidéen. Passés chez le voisin boufarikois, les Midoun ont trouvé un apport en la personne de Hocine Bendar. Difficulté Mais là aussi ils ont, en dépit de l'appui total de ce dernier, dû mettre un terme à leur aventure. En septembre 2005, l'école de tennis de Sidi Fredj est lancée à la demande du président de la Fédération algérienne de tennis (FAT), Mohamed Bouabdellah. Cette expérience n'a pas duré. L'été suivant, les Midoun décident de lancer leur propre centre de formation. Le premier constat fait au tout début par Zine Abidine Midoun est que les jeunes filles et garçons avaient un potentiel très important. «Le drame, c'est que leurs entraîneurs, dirigeants ou même les parents ne croyaient pas en eux parce qu'ils étaient persuadés que le niveau algérien est très en deça de celui de l'étranger», dira-t-il. Il reconnaît que le tennis algérien n'a pas produit de grands champions, à l'instar de ce qu'ont fait l'athlétisme, la boxe, le handball ou encore le football pour l'Algérie. Le seul à ses yeux qui pouvait tutoyer les stars mondiales était Lamine Ouahab, aujourd'hui naturalisé marocain, qui en junior était exceptionnel. Il avait, lors du tournoi junior de Wimbledon, battu Richard Gasquet en quart de finale et Rafael Nadal en demi-finale. Mais au moment où la carrière des deux tennismen européens a décollé, l'Algérien n'a pu atteindre que la 114e place mondiale. «Dans le tennis, le talent ne représente que 1% d'un joueur de haut niveau. 99% c'est du travail», affirme Zine Abidine Midoun. C'est cette règle que qu'on tente d'inculquer aux athlètes pour pouvoir atteindre le haut niveau, en poussant ces athlètes à toujours travailler encore plus. Mais Zine Abidine Midoun n'a pas oublié les moments difficiles, et sans les Karim Hamrani, Brahim Abid Charef, Rachid Sekkak, Djahid Bouhoura, Tahar Foddi, Madame Soltani, Tayeb Ezzraïmi, le patron de Sim, il n'aurait jamais pu mener à bien son projet et faire briller Inès Ibbou et honorer le pays. Avenir Maintenant que la page Ibbou est tournée, les Midoun se lancent un autre défi en prévision de 2020. «On a monté ce projet avec mon frère walid comme en 2005, avec deux investisseurs qui sont prêts à mettre de l'argent et leur temps. A partir de là, on a discuté pour former plus de 24 jeunes, nés entre 2008 et 2010, filles et garçons.» L'opération a permis de choisir huit enfants au niveau des différentes écoles de Zéralda, qui ont déjà commencé à s'entraîner depuis le début du mois de Ramadhan. L'opération de détection se poursuivra au mois de septembre prochain pour désigner les seize autres enfants à travers les régions de Staouéli, Ouled Fayet et Bab El Oued. Les joueurs qui passeront avec succès les tests où les deux techniciens focaliseront beaucoup sur l'agilité, le mental, la technique, la tactique ainsi que le don de soi seront choisis et signeront par la suite un contrat de cinq ans afin de bénéficier d'une formation de haut niveau. Pour y parvenir, il faudra beaucoup de sacrifices de la part des enfants et même de leurs parents, mais sur le plan financier, c'est l'école de formation qui prendra en charge l'opération grâce aux sponsors. «Avenir 2020 est un programme qui permettra d'avoir 8 joueurs et 8 joueuses de niveau européen. Dans les deux prochaines années, ces joueurs et joueuses seront prêts pour partir en Europe faire le circuit Tennis Europe, qui est le circuit le plus fort dans ce continent. Ils devront passer par plusieurs tournois, dont le TCBB pour les 12 ans, le top 10-12 de Bressuire, le tournoi Le Passage ; il y aura aussi le Sanchez Casal de Barcelone. Tous ces tournois sont très forts et notre ambition est d'en remporter un. Il y aura par la suite l'Orange Bowl de Miami. L'objectif est de mettre en rivalité nos joueurs avec les meilleurs joueurs mondiaux. Cette méthode a marché avec Inès Ibbou et elle fonctionnera avec les autres aussi», assure Zine El Abidine Midoun. Principes En parallèle à ce programme, le centre de formation continue de faire de la prospection et du perfectionnement des jeunes enfants, comme a tenu à nous le préciser Walid Midoun : «A la fin du mois de Ramadhan, nous allons faire un déplacement en France en emmenant avec nous les meilleurs 7-8 ans, 9-10 ans, 11-12 ans, 13-14 ans et 15-16. Au total, ils seront normalement 10 athlètes. Pour certains, ça sera leur première expérience dans des conditions réelles de jeu. On va voir leur réaction par rapport à cela après avoir passé pratiquement deux ans au centre de formation.» Yannis Terki, 7 ans et demi, et Nazim Mahi, 9 ans, seront du voyage. Les deux enfants, qui s'entraînent 4h par semaine en plus de 30 minute de physique le mardi, vouent une grande admiration à Novak Djokovic pour le premier et Rafael Nadal pour le second, ils rêvent tous deux de remporter un jour le tournoi de Roland Garros. Le chemin est encore long et il faudra beaucoup de sacrifices pour espérer y arriver. Le président de l'Académie, Nacereddine Midoun, croit dans tous les enfants qui sont dans son école de formation, avant d'ajouter : «On s'est plié en quatre pour relancer la formation avec les petits de 6 ans 7 ans pour qu'à l'avenir on puisse avoir une élite dans les 4 ou 5 ans qui puisse atteindre le haut niveau ; ensuite, ils feront leur choix. Mais d'ici là, on veillera toujours à défendre les principes de notre Académie qui sont le respect, la performance, l'esprit d'équipe et le plaisir de jouer au tennis.»