Le tout nouveau patron de Naftal affiche des ambitions pour l'entreprise. Hocine Rizou prend les rênes de Naftal avec un plan de réhabilitation et de modernisation de l'entreprise de distribution des produits pétroliers. Objectif : mettre en place un système d'information susceptible de cerner la consommation des automobilistes. Prémices à la mise en place d'un système de plafonnement de la consommation ? M. Rizou se refusera à tout commentaire, il en est de même en ce qui concerne les prix. Il estime cependant que des mesures doivent être prises pour rationnaliser la consommation et juguler le manque à gagner induit par la contrebande. - Vous avez récemment annoncé un programme d'investissements de 200 milliards de dinars pour la modernisation des stations-service. De quoi s'agit-il exactement ? Qu'entendez-vous par modernisation ? C'est un programme de développement quinquennal à moyen terme 2015-2019 de près de 200 milliards de dinars. Celui-ci n'est pas consacré aux seules stations-service. C'est tout un programme de développement axé essentiellement sur l'augmentation des capacités de stockage des dépôts carburants existants et la réalisation de nouveaux dépôts. Il s'agit aussi du développement du réseau de canalisations pour le transport de carburants et des GPL, ainsi que de l'augmentation des capacités de stockage des GPL à travers notamment la réalisation de nouveaux centres emplisseurs dans les régions du Sud, du Centre et de l'Est. Nous prévoyons aussi la mise à niveau et la modernisation des infrastructures de stockage et de distribution, notamment dans leur volet HSE. La sécurité est au centre de nos préoccupations du fait qu'il s'agit de sites classés. Il faut toujours se mettre au diapason des normes de sécurité requises à l'échelle internationale. Cette action concerne aussi les infrastructures vieillissantes qu'il faut également mettre à niveau. S'agissant du réseau de stations-service, nous sommes très bien avancés sur le programme de l'autoroute Est-Ouest, où nous avons déjà réceptionné 26 stations-service, avec comme perspective de réceptionner 7 autres stations d'ici la fin de l'année. Nous avons également mis en place un programme de rénovation et de modernisation de plus de 700 stations-service au niveau national, qui permettront une gestion moderne et automatisée ainsi qu'une augmentation substantielle des capacités de stockage. Nous prévoyons également la réalisation de 80 méga stations-service. Les études sont en phase très avancée et nous avons arrêté les assiettes foncières devant abriter ces méga stations, qui permettront aussi d'augmenter les capacités de stockage de plus de 40%. Nous sommes en contact permanent avec les autorités locales et le projet avance très bien. Par ailleurs, ces méga stations qui seront implantées à la sortie des grandes agglomérations permettront d'absorber les flux et la demande croissante en carburants. Outre l'augmentation des capacités de stockage, il sera question également d'amélioration de la qualité des services, en les rehaussant aux standards internationaux requis, à travers notamment l'introduction de l'automatisation de leur gestion. Il est prévu également, dans le cadre de ce programme de développement, le renforcement du réseau de transport par canalisations qui représente aujourd'hui 30% seulement des volumes des carburants transportés, le reste se fait par réseau routier. Il s'agit là d'inverser la tendance pour réduire les coûts, éviter les accidents de la route et assurer une meilleure protection de l'environnement. Nous nous attelons à augmenter le niveau de transport par canalisations pour le porter à 70% à l'horizon 2020. Nous sommes aussi en train de travailler sur la modernisation des systèmes d'information qui nous permettra de mieux appréhender les besoins de chaque automobiliste. - Qu'en est-il du programme de réalisation des stations le long de l'autoroute Est-Ouest ? Les contraintes, notamment en matière de foncier, ont-elles été levées ? Comme je vous le disais, sur les 42 stations prévues sur l'axe autoroutier, 21 stations sont déjà en exploitation, 7 autres seront réceptionnées au cours du dernier trimestre 2015, par contre 11 sites ont enregistré des retards en raison de nombreuses contraintes. Nous avons eu beaucoup de difficultés par rapport aux assiettes de terrain qui connaissent des problèmes d'expropriation, en plus des problèmes techniques qui ont révélé des difficultés de faisabilité des projets. J'insiste cependant sur le problème des expropriations, car malgré l'obtention des autorisations, il faut se battre tous les jours pour aller au bout du projet. - On évoque souvent le problème d'approvisionnement. Quelle stratégie entend entreprendre Naftal pour enrayer ces problèmes ? Il nous arrive de faire face à des difficultés mais qui ne perturbent aucunement l'approvisionnement, il s'agit en fait d'un glissement du programme d'approvisionnement induit par des facteurs exogènes, à l'instar du phénomène parfois récurrent des consignations des ports. Cependant, nous rassurons que nous disposons de réserves stratégiques nécessaires pour faire face à la demande et qui nous permettent d'assurer pleinement l'approvisionnement du marché national en produits pétroliers. Il faut néanmoins prendre en considération le fait que Naftal transporte le produit sur tout le territoire national, y compris dans le sud du pays. Cela représente un effort considérable. Globalement, nous assurons pleinement notre mission. Cependant, nous devons nous adapter avec le GAP qui existe entre la capacité installée et la demande qui évolue. Les infrastructures de stockage actuelles disposent aujourd'hui d'une autonomie moyenne d'une dizaine de jours. Les projets de développement lancés par Naftal vont permettre d'améliorer sensiblement cette autonomie. Je me dois de vous dire que Naftal transporte 96% de la quantité de carburants sur le territoire national, ce qui est un vrai challenge. Nous avons assuré le transport de plus 14 millions de tonnes de carburants en 2014, contre 7 seulement, il y a une dizaine d'années. - Justement, le plan de réalisation de nouvelles infrastructures de stockage est-il compatible avec les prévisions de hausse de la demande, qui plus est, avec la réception de nouvelles stations-service ? Il faut savoir que le programme d'augmentation des capacités de stockage et la réalisation de nouvelles infrastructures carburant ont été établis sur la base d'une étude effectuée par Naftal, sur l'évolution de la demande nationale en carburants à l'horizon 2030. On a également tenu compte de l'évolution du parc automobile et de la croissance économique, ainsi que du développement des énergies propres. Ce programme d'investissement permettra d'améliorer l'autonomie de stockage pour atteindre 30 jours à l'horizon 2020, contre10 en moyenne, aujourd'hui. Les nouvelles stations autoroutières disposeront d'une autonomie supplémentaire, afin d'améliorer davantage la distribution à travers notamment une autonomie de stockage plus importante. - Ce programme est-il suffisant lorsqu'on sait les problèmes liés à la surconsommation et à la contrebande ? Nous avons établi notre programme sur la base de l'étude de l'évolution de la demande sur les 20 dernières années, en tenant compte de l'évolution du parc automobile qui compte plus de 5 millions de véhicules aujourd'hui, de la croissance économique et du développement des carburants propres, tels que le GPL carburant (Sirghaz) et le GNC carburant. A ce propos, je voudrais signaler qu'un programme ambitieux a été mis au point pour la réalisation de points de vente GPL carburant sur tout le réseau Naftal. Cela concerne principalement les stations-service sur les zones frontalières. Il faut savoir aussi qu'au niveau des frontières, la consommation du carburant est plafonnée pour atténuer le phénomène de la contrebande afin d'éviter les déperditions. Naftal travaille en étroite collaboration avec les autorités concernées pour la mise en place et le suivi de ce dispositif. Comme souligné plus haut, nous sommes en train de travailler sur un système d'information qui permet d'avoir une image fidèle de la consommation réelle. Ce système vise la modernisation de notre système de gestion de la consommation, notamment dans les zones frontalières, où l'objectif assigné est de connaître les consommations réelles dans ces régions à forte présence de contrebande. Nous avons effectué un Benchmark avec des pays qui ont expérimenté ce système et qui a révélé que la consommation de carburants a connu une baisse de 20%. La mise en place de ce système d'information est prévue dans le plan de développement des stations-service, lequel permettra de profiler la consommation des automobilistes et à terme la rationaliser… Il est de notoriété publique que le prix des carburants en Algérie est très bas, nous estimons que des mesures sont nécessaires pour atténuer les phénomènes du gaspillage et de déperdition occasionnée par la contrebande dans les régions frontalières, qui se font ressentir de plus en plus et qui deviennent des charges pour le Trésor public.