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«Les entreprises cotées en Bourse doivent avoir une politique des dividendes» Abdelhakim Berrah. Président de la Commission d'organisation et de surveillance des opérations en Bourse
- La cimenterie de Aïn Kebira (Sétif) vient de recevoir le visa de la Cosob pour l'ouverture de son capital via la Bourse. Cette initiative signe-t-elle le lancement de l'opération d'ouverture de capital d'un lot d'entreprises publiques ainsi que décidé par le CPE ? Effectivement, la cimenterie de Aïn Kebira est la première des huit entreprises publiques qui ouvriront leur capital via la Bourse d'Alger, tel que cela a été décidé par le Conseil des participations de l'Etat (CPE). L'introduction de la cimenterie de Aïn Kebira se fera par une augmentation du capital de l'entreprise, ce qui veut dire par l'émission de nouvelles actions, pour financer une nouvelle ligne de production et doubler les capacités de production de la cimenterie. Deux autres cimenteries, celles de Chlef et de Tébessa, sont en phase de préparation. D'autres entreprises prévoient également d'opter pour la Bourse et sont à différents niveaux de préparation. Ce qui veut dire que l'ensemble de ces entreprises sont en pleine évaluation au niveau interne, et suivent certains mécanismes leur permettant en bout de chaîne de déposer un dossier à la Cosob. - Que voulez-vous dire quand vous indiquez que ces entreprises sont à différents niveaux de préparation ? Il est plus facile pour une entreprise mono-unité, comme c'est le cas pour une cimenterie, de faire l'évaluation de ses actifs, que pour une entreprise comme la CAAR ou le CPA qui gèrent plusieurs services. GICA (auquel sont affiliées les cimenteries, ndlr) a aussi plus d'expérience dans ce procesus, grâce aux partenariats qu'il a noués. Par ailleurs, il y a des dirigeants qui vont plus vite que les autres. - Quelles sont les entreprises concernées par le processus ? Le CPE a décidé d'ouvrir le capital de trois cimenteries, celles de Aïn Kebira, Chlef et Tébessa, la CAAR, le CPA, Hydro Aménagement, Cosider Carrières et Mobilis. En parallèle, d'autres entreprises du secteur privé se préparent à entrer en Bourse. On vient d'ailleurs de donner le visa à Biopharm. La situation actuelle de l'économie nationale et la baisse des prix du pétrole pousseront les entreprises à chercher des financements via le marché. - La relance du processus a-t-elle été favorisée par l'adoption de la loi de finances 2016 et des dispositions relatives à l'ouverture du capital des entreprises publiques ? C'est juste un hasard de calendrier. J'ai bien suivi le processus. L'opération concernant les cimenteries a été motivée par plusieurs facteurs. Parce que d'abord le marché du ciment est porteur, mais aussi parce qu'on veut développer ces cimenteries et moderniser la filière. C'est dans cette optique que le choix s'est porté sur une augmentation de capital et non une offre publique de vente qui, elle, aurait permis de récolter des fonds au profit du Trésor public et non à celui de l'entreprise. Le but, en incitant les entreprises à venir en Bourse, c'est de les pérenniser. Il ne s'agit pas de les brader. - Les quelques opérations de financement qui ont été menées jusqu'à présent ont été dominées par les investisseurs institutionnels. Qu'en est-il du grand public ? Nous souhaitons susciter l'intérêt du grand public. En parallèle des mesures prises par le gouvernement en ce qui concerne la conformité fiscale volontaire, le marché financier participe à la bancarisation des fonds circulant dans l'informel. Mais, il faut offrir de bons produits aux investisseurs. C'est là où il n'y a pas assez de produits. Il faut réfléchir à des obligations indexées sur l'inflation, des obligations qui répondent aux besoins des investisseurs, comme les produits «sharia compliant», ou les OPCI (Organisme de placement collectif en immobilier, ndlr). Il faut que le marché offre à chaque investisseur des produits qui lui conviennent en termes de taux ou de placement. - Vous évoquez l'immobilier. Les marchés financiers matures sont dynamisés par le segment Real Estate. Cependant, le marché immobilier est très informel en Algérie… On peut commencer par l'immobilier de bureaux. Quand une entreprise achète de l'immobilier pour son patrimoine, c'est formel. L'investissement dans l'immobilier est culturellement ancré dans notre société. On peut offrir à un investisseur qui ne peut pas acheter un bâtiment, d'en acheter un petit pourcentage. - Ceux qui détiennent les fonds n'ont néanmoins aucune confiance en le marché financier. Comment alors les inciter à y investir ? Nous visons une majorité de personnes qui n'ont pas confiance dans le marché pour diverses raisons, qu'elles soient culturelles, religieuses, fiscales, ou défaillance du système bancaire… Il faut donc créer autant de raisons qui pousseront ces personnes à mettre leur argent à la banque ou en Bourse. Il y a beaucoup de gens qui thésaurisent leur argent chez eux. Et au lieu d'aller acheter des devises et les épargner, il faut offrir à ces personnes des alternatives, que ce soit dans l'immobilier, la finance islamique, ou des produits offrant un taux d'intérêt positif, c'est-à-dire supérieur à l'inflation. - Une problématique demeure cependant entière. Des titres émis sur le marché primaire perdent en valeur sur le marché secondaire. Comment y remédier ? Cela est dû à plusieurs facteurs. Il s'agit en premier de la profondeur du marché. Il n'y a pas assez de titres cotés en Bourse, et il n'y a, par conséquent, pas de jeu de spéculation et d'achat-vente de titres. Ensuite, il n'y a pas de répercussion de l'efficience d'une entreprise cotée sur le marché. Il n'y a pas non plus assez de professionnels sur le marché pour informer les investisseurs. Ces derniers ont besoin d'informations et de confiance. Il faut aussi que les entreprises cotées aient une politique des dividendes. C'est le cas d'El Aurassi, et c'est pour cela que la valeur du titre augmente. A défaut d'information et d'analyse financière, il faut qu'il y ait une politique des dividendes. Si vous donnez des dividendes, les investisseurs achèteront vos titres. Si vous dites que vous êtes une excellente entreprise et que vous allez vous développer, sans donner de bons dividendes, les investisseurs se détourneront de vos titres. Les gens ont également acheté le titre Dahli, car le taux d'intérêt était intéressant. Ceux qui ont de l'argent savent où le mettre. Ils ne veulent pas de promesses, ils veulent des gains.