Regroupés sous un olivier, pour échapper à cette fine pluie de l'automne, des collégiens d'Ath Ouabane, de la commune d'Akbil (Aïn El Hammam, 70 km à l'extrême sud-est de Tizi Ouzou), guettent impatiemment le premier transporteur à destination de leur village. Un autre groupe, des garçons, a « choisi » de parcourir les 6 km le séparant de son hameau, à pied. « Nous faisons ce trajet tous les jours, matin et soir, depuis deux ans », lance Juba souriant. Selon ce collégien, âgé d'à peine 13 ans, l'APC d'Akbil, qui vit une situation de blocage total, n'assure pas le ramassage scolaire pour les élèves d'Ath Ouabane, coincé à l'intérieur de l'imposante montagne du Djurdjura, à près de 1600 m d'altitude. Les parents d'élèves ont eu recours au service des transporteurs privés, pour 500 DA le mois. Ceux qui n'ont pas les moyens doivent continuer à marcher à pied ou à faire de l'autostop. Pour éviter d'arriver en retard, ces enfants doivent se réveiller à 6 h, en raison de l'insuffisance du nombre de fourgons. Les transporteurs sont contraints à assurer plusieurs dessertes. Cette situation cause d'autres désagréments à ces adolescents, interdits d'accès au collège avant 7 h 45, même durant les dures journées de la saison hivernale. « Nos enfants ne sont pas autorisés à s'abriter à l'intérieur de leur CEM en dehors des horaires fixés aux études », dénonce un parent d'élève, déplorant l'absence quasi-totale d'une prise en charge de ces collégiens. Les lycéens ont, quant à eux, la chance d'être hébergés à l'internat de Souk El Had, dans la commune de Yatafène (Ath Yenni). A Ath Ouabane, au niveau de l'école primaire, l'on est vite attiré par ces vieux bâtis qui servent de salles de cours pour les écoliers. Les façades extérieures de l'établissement sont lézardées. La boiserie des portes et des fenêtres s'effrite en petits morceaux, laissant s'infiltrer les eaux de pluies dans les classes. Pourtant, cette structure a été construite au début des années 1980, grâce à la volonté de la population locale. L'APC d'Akbil n'a jamais refait la peinture ni procédé au changement des portes et fenêtres endommagées, depuis l'ouverture de l'école, affirme-t-on. Pis, le nouveau bloc, composé de quatre salles de cours et inauguré en 2002, présente déjà des fissures. Le directeur de l'école déclare que son établissement n'est pas bien alimenté en mazout. « Notre petite quote-part de carburant, ne survit pas à la première moitié de l'hiver. Les classes demeurent parfois sans chauffage pendant plus d'une semaine, à cause du retard pris, à chaque fois, dans l'acheminement des citernes de mazout », déplore notre interlocuteur. Ce dernier affirme qu'il demande vainement, depuis plus d'une année, à l'APC d'aménager un petit terrain de son école en aire de jeu. La démission des pouvoirs publics a poussé les habitants d'Ath Ouabane à prendre en charge le dallage de la cour de cet établissement, dont trois classes sont fermées à cause de la diminution de l'effectif. Cet isolement n'a toutefois pas découragé tous ces écoliers qui rêvent de devenir un jour des cadres dans un Etat qui semble les avoir complètement oubliés.