La célébration, demain 1er novembre, du 62e anniversaire du déclenchement de la Révolution intervient cette année dans une conjoncture de crise, dont les effets qui commencent déjà à se faire lourdement sentir sur le pouvoir d'achat des citoyens et la santé économique et financière du pays ont créé un climat de léthargie et d'inquiétude généralisées. Cette commémoration chère au cœur des Algériens aurait pu et dû être l'occasion d'une halte rétrospective pour mesurer la fidélité au serment des chouhada fait par les générations post-indépendance et particulièrement les équipes dirigeantes qui se sont succédé aux commandes du pays. Les bâtisseurs de l'Algérie indépendante ont-ils été à la hauteur des sacrifices et des idéaux de Novembre portés par les moudjahidine et moudjahidate tombés en martyrs ou ceux qui sont encore en vie et sont restés dignes, refusant de céder aux compromissions politiques et au chantage sordide à coups de distribution de prébendes et de promotion à des postes de responsabilité ? Comme ils le furent par le passé en s'engageant dans la Révolution, à la fleur de l'âge, sacrifiant leur jeunesse, leur famille et leurs biens qu'ils n'ont pas hésité un seul instant à mettre au service de la Révolution. C'est parce que nos dirigeants – pas tous heureusement – après l'indépendance n'ont pas eu ce souci constant de se ressourcer aux valeurs de Novembre pour puiser les enseignements qui ont permis à un noyau de révolutionnaires de triompher de l'une des plus grandes puissances militaires mondiales que l'on a assisté aux dérives totalitaires dans le pays et à tous les maux que la Révolution a puissamment combattus et qui ont pour noms : le zaïmisme, le régionalisme, le népotisme, les injustices sociales, la suprématie du militaire sur le politique. Les différents pouvoirs qui se sont succédé après l'indépendance ont joué à fond la carte de la légitimité historique et révolutionnaire en confiant des responsabilités dans les institutions et au sein du parti unique, le FlLN d'après-indépendance, pour se donner une légitimité populaire qu'il leur était difficile d'obtenir par des élections libres et démocratiques. Ce fonds de commerce, basé sur l'appropriation sectaire de l'histoire qui a empêché l'alternance au pouvoir et la transition intergénérationnelle de la responsabilité, ne suffit plus aujourd'hui pour mobiliser les Algériens face aux défis qui se posent au pays. Quand on voit ce qu'on a fait de l'héritage de la Révolution du 1er Novembre avec ces luttes constantes et insatiables pour le pouvoir entre les différents clans, la constitution de ces fortunes colossales bâties à l'ombre du pouvoir, et en face la précarité qui s'installe dans la société du fait de la mauvaise gouvernance conjuguée à la crise, c'est l'esprit de Novembre que l'on a tué et, dans son sillage, l'espoir d'une Algérie fraternelle, généreuse avec tous ses enfants, telle que l'avaient rêvée et imaginée nos valeureux martyrs et moudjahidine. Que retiendront nos enfants du message de Novembre quand on ne fait même plus l'effort de célébrer dignement les fêtes nationales comme autrefois ? Les activités protocolaires officielles organisées à l'occasion des dates commémoratives de la Révolution à coups de visites de chantiers et d'inaugurations de réalisations ne sont pas le meilleur moyen pédagogique pour restituer à la Révolution son authenticité et sa flamme novembriste. Ni un gage de fidélité.