«L'ANP est une armée républicaine.» Après des semaines d'absence, Ahmed Gaïd Salah reprend son bâton de pèlerin. Pour envoyer des messages, le chef d'état-major de l'ANP s'est rendu à Blida, siège de la 1re Région militaire. Officiellement, le message du général de corps d'armée s'adresse aux troupes. Il rappelle, selon le message envoyé par le ministère de la Défense nationale que «l'ANP est une armée républicaine, fidèle au serment, à la ferme abnégation et dévouement, qui attache à ces valeurs leur véritable sens, et les imprègne dans les esprits et les âmes de ses éléments, au service de l'Algérie et uniquement l'Algérie, une armée cernant parfaitement ses responsabilités et prérogatives, qui adopte une stratégie à long terme, aux approches graduelles et rationnelles, aux objectifs profonds, aux repères clairs et à une vision perspicace», a donc souligné celui qui occupe le poste de vice-ministre de la Défense nationale. Le discours fait écho à un commentaire publié le mois dernier dans la revue El Djeïch, l'organe officiel de le grande muette. «(…) J'ai déjà confirmé (…) que l'ANP (…) accomplit ses missions conformément à la Constitution et suivant les orientations de Son Excellence M. le président de la République, chef suprême des Forces armées, ministre de la Défense nationale, et demeurera à jamais, en accomplissant son devoir national, fidèle aux valeurs du serment prêté devant Dieu, devant le peuple et devant l'histoire», insistera l'orateur. Il ajoutera que la seule «priorité» des forces armées est «la sécurisation de l'Algérie et de son peuple». L'adresse d'Ahmed Gaïd Salah va donc plus loin que les soldats et éléments de l'ANP. Elle intervient dans un contexte où les regards sont rivés sur lui depuis le départ de Amar Saadani. Ce changement à la tête du FLN est justement expliqué par des observateurs par une «très grande proximité» née entre les deux hommes. Une liaison vue comme une alliance politique qui vise avant tout à placer le militaire sur orbite en prévision de l'élection présidentielle de 2019. Avec la démission-limogeage de Amar Saadani, les regards étaient donc orientés vers le chef d'état-major de l'armée. L'homme n'a jamais exprimé publiquement une envie de s'affranchir du chef de l'Etat. Mais des proches ont souvent avancé que le chef de l'armée nourrit une douce envie de briguer la présidence de la République. Lui qui a toujours déclaré ne pas se mêler de politique n'a pas résisté à la tentation d'envoyer une lettre de félicitations à Amar Saadani lorsque ce dernier a été intronisé, en mai 2015, secrétaire général du FLN. C'est le début d'une confusion qui s'est ajoutée à celle qui entourait la double casquette, civile et militaire, d' Ahmed Gaïd Salah. Une situation dénoncée par des cadres de l'ANP mais qui n'a jamais trouvé écho à la présidence de la République. Plus qu'une alliance, ce rapprochement entre Saadani et Gaïd Salah s'est transformé en un clan qui a commencé à se constituer au sommet du pouvoir. Autour du vice-ministre de la Défense et de l'ancien secrétaire général du FLN, se sont regroupés, en effet, des ministres et hommes d'affaires. Tout était donc prêt pour tracer la route au chef d'état-major dans le cas où Abdelaziz Bouteflika ne briguerait pas un 5e mandat présidentiel. Mais la réapparition du chef de l'Etat et la récupération du FLN à travers la désignation de Djamel Ould Abbès comme secrétaire général ont fini par redistribuer les cartes. C'est sans doute pour mettre fin à cette situation inédite que des informations, difficiles à confirmer, évoquent un important changement à venir. Ahmed Gaïd Salah serait sur le point de céder son poste de chef d'état-major. Il se contentera de siéger au gouvernement. Pour occuper le poste opérationnel, des noms circulent : le général-major Saïd Chengriha, commandant de la 3e Région, ou encore le général Habib Chentouf, chef de la 1re Région militaire. C'est ce dernier qui a reçu le vice-ministre de la Défense nationale. Signe que ce général fait l'objet d'un consensus au sommet de l'Etat ?