Les cinq militants sont accusés de faits graves : «Tentative de renverser le régime», «incitation à prendre les armes», «incitation à la violence et à la haine». Le feuilleton judiciaire des militants de la fédération du Front des forces socialistes de Ghardaïa ne semble pas connaître son épilogue. Placés sous contrôle judiciaire depuis le 19 décembre 2016 sur ordonnance du juge d'instruction près la cour de Ghardaïa, les cinq accusés ont contesté la décision auprès de la chambre d'accusation et, en même temps, le procureur de la République, lui, a réclamé la mise en détention provisoire. Présentés hier devant la chambre d'accusation, la cour de Ghardaïa a «coupé la poire en deux», confirmé leur maintien sous le régime de contrôle judiciaire et rejeté la réquisition du procureur. La décision de la chambre d'accusation restreint la liberté de mouvement des cinq militants. L'épée de Damoclès reste suspendue au-dessus de leurs têtes. Elle inflige une vie en sursis à des militants politiques et associatifs connus pour leur engagement citoyen et surtout leur implication décisive dans le retour au calme durant les violents événements qu'a connus la vallée du M'zab entre 2013 et 2015. Le FFS a dénoncé, la veille, «une cabale judiciaire qui intervient à la veille des échéances électorales» et a exigé «l'arrêt immédiat des poursuites judiciaires et la levée de toute mesure visant astreindre la liberté» de ses militants. Pour rappel, les cinq militants sont accusés de faits graves : «Tentative de renverser le régime», «incitation à prendre les armes», «incitation à la violence et à la haine». Hamou Mosbah qui est également membre de la direction nationale du FFS chargé de la solidarité dénonce une «manœuvre visant à faire taire tous les militants politiques et associatifs qui s'élèvent contre la mafia financière et foncière locale» qui serait, selon lui, «derrière le harcèlement judiciaire». Il est vrai que le foncier dans la vallée du M'zab est un des enjeux sensibles au centre du conflit violent qui a secoué la région qui demeure sur un brasier tant les autorités politiques n'ont pas eu l'audace de s'attaquer aux multiples causes de la crise, privilégiant des solutions répressives qui ne font que l'aggraver. C'est le cas avec la mise en détention d'une soixantaine de citoyens de la Vallée depuis 18 mois sans jugement. Un châtiment contre lequel s'élèvent les prisonniers, réclamant leur libération et un jugement rapide et équitable. Kamel Eddine Fekhar, le plus célèbre des détenus, désigné par le gouvernement Sellal comme «le fauteur de troubles», a entamé une grève de la faim au péril de sa vie. Il est à sa troisième semaine. Son état de santé s'est dégradé, ce qui a nécessité son transfert à l'hôpital de Laghouat. Plusieurs militants des droits de l'homme redoutent une fin tragique. Mise en difficulté, l'administration pénitentiaire d'El Menéa a été contrainte de rendre public un communiqué indiquant que le détenu est «pris en charge médicalement et fait l'objet d'un suivi quotidien et a été transféré le 15 janvier à l'hôpital de Laghouat afin de poursuivre sa prise en charge médicale». Elle n'a pas manqué l'occasion pour charger son avocat Salah Debbouz. Elle «regrette la position de Me Debbouz Salah, qui devrait recommander à son client de mettre fin à sa grève de la faim au lieu d'exploiter son état de santé et d'en faire étalage à travers les médias». L'avocat contredit la direction de la prison en affirmant qu'il a, à maintes reprises, exhorté son client de suspendre sa grève de la faim. «Mon rôle est de défendre mon client, mais également d'alerter l'opinion publique de la situation qu'il vit, c'est lui qui me le demande», réplique-t-il. Cette situation, qui devient de plus en plus insupportable pour toute la région, ne fait qu'amplifier l'état extrêmement tendu qui y règne et qui recrée les conditions d'une nouvelle vague de violences.