Parmi les accusés, Hamou Mesbah, membre de la direction du parti chargé de la solidarité. A Ghardaïa, le harcèlement judiciaire contre des militants politiques et associatifs ne connaît pas de répit. Après l'emprisonnement d'une centaine de personnes sans jugement depuis maintenant 17 mois, la chambre d'accusation du tribunal de la ville a placé, avant-hier, sous contrôle judiciaire cinq militants, dont quatre appartiennent au Front des forces socialistes et le cinquième est membre de la direction du parti. Il s'agit de Hamou Mesbah, secrétaire national chargé de la solidarité, Baba Oumoussa Bahmed, Khodir Babaz, les deux autres sont membres du conseil national du FFS, Omar Bouhedjiba, militant du parti et Dadi Nounou Noureddine, militant associatif et membre du comité de coordination et de suivi des événements de Ghardaïa. Les cinq accusés, connus pourtant pour leur rôle citoyen pacifique pour ramener le calme durant les tragiques événements de la vallée du M'zab, sont poursuivis pour des faits lourds : «Tentative de renverser le régime», «incitation à prendre les armes», «incitations à la violence et à la haine». Absurde. A en croire des avocats des prévenus, la chambre d'accusation s'est appuyée sur des commentaires et des publications sur une page facebook, «information de Thawath», qui visiblement dérange beaucoup les autorités locales. «C'est incompréhensible ! Nous sommes des gens de paix, jamais nous nous n'avons incité à la violence, ce n'est pas dans notre culture, encore moins dans notre façon de faire. Notre tort est notre engagement citoyen en faveur de la justice et notre dénonciation des injustices à Ghardaïa. Notre tort est d'avoir osé dire non à la déstabilisation de Ghardaïa», s'indigne Hamou Mesbah. Ce dernier accuse «la mafia du foncier, un lobby puissant dans la région, qui tire les ficelles et qui cherche à nous faire taire». Il est vrai que le foncier a toujours été au centre des conflits qui secouent la vallée du M'zab. Mais pas seulement. Les accusés rejettent catégoriquement ce qu'ils appellent «des accusations non fondées, inscrites dans un nouvel épisode dans l'escalade judiciaire visant à faire taire des voix de la raison dans une région, en raison de beaucoup de facteurs, placée sur une volcan». Il est utile de rappeler que depuis fin 2013, la vallée du M'zab est dans une zone de violence cyclique qui a eu pour conséquences des morts, des blessés et des dégâts matériels. Le patrimoine historique de cette cité millénaire, classé patrimoine universel, n'a pas été épargné. Nombres d'acteurs locaux n'ont cessé d'attirer l'attention de l'opinion et des pouvoirs publics sur les risques d'embrasement général. Dans l'incapacité avérée d'apporter des réponses adéquates et durables à une crise aux formes multiples, les pouvoirs publics se sont suffi des «solutions» policières et punitives qui ont vite connu leurs limites. Faut-il rappeler que la mutinerie de la police d'octobre 2014 est partie de Ghardaïa. Un policier s'était même donné la mort dans un commissariat. Signe d'un échec frappant. Le gouvernement, visiblement dépassé par les événements, ne s'est pas embarrassé pour désigner les «têtes de la fitna» (responsables de troubles). Doublant le travail de la justice, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et le directeur du cabinet de la Présidence, Ahmed Ouyahia, accusaient nommément des citoyens de Ghardaïa sans apporter de preuves, poussant la justice à abattre sa main lourde. Depuis le mois de juillet 2015, Kamel Eddine Fekhar et ses amis croupissent derrière les barreaux sans procès. Depuis cette date, d'autres citoyens de la vallée sont poursuivis et placés en détention provisoire. La mise sous contrôle judiciaire des militants du FFS s'inscrit manifestement dans cette logique répressive qui cible des militants politiques et associatifs dont le rôle est jugé positif dans le retour au clame. «Ces militants ont un grand sens des responsabilités, dans le cadre de leurs activités au sein du comité de coordination et de suivi, ils n'arrêtaient pas d'appeler au calme. Le FFS dans cette région dérange beaucoup d'intérêts occultes», accuse un des avocats des prévenus.