La plupart des candidats et partis engagés dans la course pour les élections législatives du 4 mai 2017 oublient la culture, les arts, la science et le savoir ou lui consacrent quelques lignes, un petit chapitre ou un passage court. Un état des lieux. La culture est presque invisible dans les programmes, les discours et les déclarations des candidats et des partis qui participent actuellement à la campagne pour les élections législatives du 4 mai 2017. Une campagne qui dure jusqu'au 30 avril. Seuls le RCD, le MPA, le Mouvement du changement, El Adala, le MSP et le PT accordent de l'intérêt, à des degrés différents, à la culture. Le développement des arts, la protection des artistes, la relance de l'activité cinématographique, l'ouverture de galeries d'art, le soutien à l'édition et à la distribution des livres, la formation artistique et d'autres thèmes liés à la culture sont absents ou peu présents dans les plans d'action des autres partis et candidats. Cela peut renseigner sur l'intérêt que porte la classe politique algérienne à la culture et aux arts. Le programme électoral du FLN, enfin dévoilé sur le site internet du parti, évoque l'emploi, la protection sociale, la santé, l'habitat, le transport, les ressources humaines, l'éducation, la formation professionnelle, les finances, la politique extérieure… et rien sur la culture. Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) a publié un programme détaillé dévoilant ses visions et ses propositions pour le développement des libertés politiques, la justice, l'économie, le tourisme, la défense et la politique extérieure. Dans le chapitre «développement social et culturel», le parti d'Abderrazak Makri consacre une douzaine de lignes pour la culture. Il s'agit principalement de : soutien à la lecture et aux bibliothèques publiques, le développement du patrimoine culturel et de l'artisanat, l'encouragement de la coopération entre les secteurs du tourisme et de la culture, l'introduction de l'artisanat dans les manuels scolaires et la restitution des archives. Rien sur le cinéma, le théâtre, la musique, les arts visuels et les arts vivants. Le mot «art» est inexistant dans le programme du MSP. «Depuis 1999, le RND soutient le président Abdelaziz Bouteflika dans la mise en œuvre de ses programmes successifs. Il concourt aussi au développement national avec la concrétisation de ses propositions au niveau du gouvernement et du Parlement. C'est donc avec le même esprit que le Rassemblement soumet ce programme aux électeurs avec l'engagement de le concrétiser sur le terrain», écrit le RND dans le prologue de son programme essentiellement concentré sur l'économie et les finances. Le parti d'Ahmed Ouyahia y évoque «la préservation de l'unité et de la stabilité du pays», «la poursuite de l'amélioration de la gouvernance» et «l'accélération de la transition économique». Quid de la culture ? Rien ! Le RND souligne uniquement la nécessité d'ouvrir «l'école, le collège et le lycée sur les langues étrangères et les disciplines scientifiques» et propose «l'élargissement de l'enseignement de tamazight à travers le territoire national». Le RND n'a donc aucune idée à proposer pour rouvrir les salles de cinéma, développer l'édition des livres, encourager la formation aux arts de la scène ou doter les artistes algériens d'un vrai statut ! Le «renouveau culturel» du RCD Le RCD propose, pour sa part, «un renouveau culturel» qui est lié au tourisme et à l'artisanat. La culture n'est pas perçue comme un secteur à part. Le RCD propose par exemple de recenser les résidences d'Etat affectées à divers commis de l'Etat «dans le but de les transférer au secteur du tourisme et de la culture en vue de servir de musées ou de gîtes pour les touristes». Le parti de Mohcine Belabbas propose également de construire un grand musée de l'Histoire «afin de recueillir, d'étudier, de conserver et de présenter des objets matériels qui témoignent de l'histoire multimillénaire de l'Algérie». «Il sera aussi une institution de recherche en histoire, archéologie, anthropologie, cultures populaires, des arts et des antiquités», est-il souligné. Le RCD appelle à protéger physiquement les sites naturels et archéologiques comme les gravures rupestres du Sud du pays. Le Mouvement populaire algérien (MPA) précise dans son programme que la promotion, la production et la diffusion de la culture sont au centre de ses préoccupations. Il plaide pour la mise en œuvre d'une véritable politique culturelle qui doit intégrer «l'ensemble des éléments constitutifs de notre patrimoine historique, linguistique et civilisationnel». «Pour ce faire, la liberté de penser et de créer est le principe de base sans lequel aucun rayonnement culturel n'est envisageable. Il s'agit de garantir l'accès de la culture pour tous et d'encourager une production de qualité, financer les grands projets culturels, assouplir les procédures d'infrastructures culturelles locales, stimuler l'éclosion des potentialités régionales, sauvegarder ou restaurer le patrimoine national et développer les échanges qui permettent à la société une véritable ouverture sur la culture universelle», est-il relevé dans le programme du MPA. Le parti de Amara Benyounes est le seul à avoir proposé une grande réforme de la formation artistique et la réhabilitation des métiers de l'art. Il plaide pour l'ouverture de nouveaux espaces de création et de consommation culturels et la généralisation de l'accès aux produits culturels. Le MPA entend réorganiser l'édition et réduire les prix de production et d'acquisition du livre. Il propose l'instauration d'une véritable industrie cinématographique et le développement des arts plastiques, le théâtre et la musique. Le Front du changement veut de «la culture pour tous» Le Front du changement (FC), qui prépare sa fusion avec le MSP, consacre quelques lignes dans son programme «à la politique de la promotion de la culture». Le parti de Abdelmadjid Menasra veut de «la culture pour tous», plaide pour la revivification des «cultures populaires», propose de soutenir «la création et les arts dans tous les domaines dans le respect des valeurs de la nation» et entend encourager «la diversification culturelle». Le FC propose de soutenir le mouvement de la traduction, la promotion du patrimoine culturel et la réhabilitation de l'homme de culture. Le parti El Adala de Abdallah Djaballah, qui a créé une union avec deux autres partis islamistes El Bina et Ennahda, propose d'améliorer «le goût artistique» chez les enfants et les jeunes dans le sens du «respect des bonnes mœurs» et lutter contre «l'invasion culturelle». El Adala propose de restructurer et de réhabiliter les infrastructures culturelles comme les salles de théâtre, d'introduire le théâtre pour enfants dans les manuels scolaires, de construire une cité cinématographique, de revoir la politique fiscale pour le secteur de l'édition des livres et d'appuyer la production des films. Le parti de Djaballah préconise l'écriture de l'Histoire de la guerre de Libération nationale et la prise en charge de la protection du patrimoine culturel. Le Parti des travailleurs contre l'austérité Le Front El Moustakbal (FM) veut, de son côté, développer «la diversité culturelle» et soutenir «la production intellectuelle, littéraire et cinématographique sous toutes ses formes». Le parti de Abdelaziz Belaïd entend créer un office indépendant pour le livre et retient l'idée de développer la coopération dans le domaine de la protection des sites et monuments historiques et cultuels. «L'Etat doit promouvoir et accompagner toutes les initiatives culturelles surtout au niveau local», est-il écrit dans le programme. Le Parti des travailleurs (PT), qui vient d'actualiser ses engagements, critique la politique d'austérité qui touche, depuis presque deux ans, le secteur de la culture. Une austérité qui, selon le parti de Louisa Hanoune, menace les postes d'emploi, la production artistique et l'unité nationale. Le PT s'engage, par conséquent, pour la suppression de la réduction du budget de la culture de 50% (décidée par le gouvernement depuis le début de l'année en cours) et pour la restitution au secteur de la culture «des moyens nécessaires à son épanouissement tout en combattant la prédation et le pillage». Le PT s'engage aussi pour la défense des infrastructures et organismes culturels publics, «acquis de la collectivité nationale». «Nous nous engageons à défendre tous les espaces culturels, à promouvoir la liberté de création et à assurer la protection de l'artiste par l'application effective de son statut (revenus, retraite, santé)», est-il relevé dans le plan d'action du parti de gauche.