C'est le ras-le-bol. Dans les cafés, chez le coiffeur, l'épicier et dans les maisons, on ne parle que de ça. Les réseaux sociaux explosent de commentaires coléreux, de réprobation et d'invectives à l'adresse des membres de l'APC, accusés d'avoir détourné les instructions du ministère de l'Intérieur et vendu la ville à leurs proches. A la rue du 24 Février, une artère comme toutes les autres, une des rues perpendiculaires aux deux rues principales du centre-ville, deux gamins pas plus hauts que trois pommes se précipitent pour vous réclamer 50 DA, le droit de stationner, là où depuis des décennies vous gariez votre véhicule pour aller faire vos courses. Vous commencez par croire qu'il s'agit de chenapans qui veulent se faire un peu d'argent de poche en bernant les estivants, mais vous écarquillez les yeux lorsqu'ils brandissent un badge, un carnet de tickets et vous montrent le panneau très rudimentaire où il est écrit «Parking». C'est la stupéfaction. Et c'est partout pareil, là où on sait qu'ils sont nombreux les automobilistes, les résidents ou estivants, qui, pour une raison ou une autre, stationnent leurs véhicules. «Alors que partout ailleurs on fait d'énormes efforts pour éliminer ces parasites de parkingueurs, l'APC d'El Kala, au contraire, les encourage avec dit-on la complaisance du wali, qui ne peut pas l'ignorer», est le commentaire qui revient le plus souvent, et de là à penser qu'il s'agit d'une affaire de gros sous à se partager, il n'y a qu'un pas vite franchi. C'est vrai que ce sont de gros sous. Les boulevards, comme celui qui longe la cité FLN sur les hauteurs de la ville, le lieu de détente de centaines de familles des cités populeuses, est livré aux parkingueurs contre 100 DA par voiture. Alors qu'il est question de 50 DA selon le cahier des charges, car il y en a un qui sert de prétexte à cette mainmise sur la ville. Faites le compte, il y a 700 mètres exploités par les parkingueurs. En 10 minutes, nous avons compté 400 voitures. Idem pour la Corniche, longue de 800 m. Au téléphone, le président de l'APC nous explique que c'est pour lutter contre le chômage des jeunes et qu'il y a, comme pour les plages, un cahier des charges qui encadre l'activité. «Nous sommes sommés de trouver coûte que coûte de l'argent pour la commune», tente-t-il encore de nous persuader. Peu convaincant. «A ce prix-là, je voudrais bien être chômeur moi aussi, même pour seulement trois mois par an», répondent nos interlocuteurs quinquagénaires du café de la Gare, qui sont médecins, cadres et universitaires. Il y a manifestement de l'abus et c'est le citoyen pris en otage qui en est victime. Les salariés sont les seuls à payer leurs impôts, parce qu'il y a prélèvement à la source et les automobilistes avec leurs véhicules parce qu'ils sont une proie facile et complètent désarmés, surtout s'ils sont en famille. Si le maire veut lutter contre le chômage, qu'il bouge un peu en trouvant des activités pérennes créant des richesses. Ce n'est pas avec des emplois temporaires qui encouragent le gain facile et le parasitisme et qui dévalorisent le travail honnête. Sur les plages, le constat est le même. Alors que le gros des estivants n'a pas encore débarqué, tout est fait pour soutirer le maximum de sous au citoyen sans rien en retour. Pas même la tranquillité et la propreté, qui lui sont assurés par le cahier des charges et encore moins la place gratuite que le ministre de l'Intérieur s'égosille à rappeler aux gestionnaires. Il n'a pas été entendu à Alger, comment le serait-il si loin de la capitale ?