La mise en œuvre de la décision de recours à la planche à billets est enclenchée avec la présentation, hier au niveau de la Commission des finances de l'Assemblée populaire nationale, du projet de loi portant amendement de l'ordonnance relative à la monnaie et au crédit. Présenté par le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, ce projet de loi est justifié, affirme le gouvernement, par «le risque majeur sur la capacité de l'Etat à poursuivre ses efforts de développement économique et social». L'amendement dont fait l'objet le texte de loi sur la monnaie et le crédit concerne un seul article autorisant la Banque d'Algérie, à titre exceptionnel et durant une période de cinq années, à procéder à l'achat direct de titres émis par le Trésor pour, d'une part, financer les besoins de financement du Trésor et, d'autre part, financer le remboursement de la dette publique interne. Cette dernière touche notamment aux titres de l'emprunt national pour la croissance levé en 2016, aux titres du Trésor émis en contrepartie de la dette bancaire de Sonelgaz, ainsi que ceux émis au profit de Sonatrach en compensation du différentiel sur les prix des carburants importés et de l'eau dessalée. L'article 45 bis introduit dans la loi sur la monnaie et le crédit autorisera en outre le Trésor à se doter de ressources et garantir le financement du Fonds national d'investissement afin de répondre aux besoins financiers des programmes de développement économique et social. A terme, cette disposition permettra, indique encore l'exposé des motifs de l'amendement de la loi sur la monnaie et le crédit, à un «rétablissement des équilibres de la trésorerie de l'Etat» et «l'équilibre de la balance des paiements». Le recours au financement non conventionnel que propose le gouvernement et qui est très décrié par de nombreux économistes sera mis sous contrôle d'un mécanisme de suivi. «L'utilisation du financement non conventionnel devrait être rigoureusement encadrée et soumise à un suivi continu», a assuré hier Raouya en notant que des critères de performance seront au cœur de ce mécanisme de contrôle. Abderrahmane Raouya a indiqué en outre que les réserves de change chuteront à 97 milliards de dollars à fin décembre de l'année en cours. Des réserves de change qui «étaient à 105,8 milliards de dollars à fin juillet dernier», soulignait hier le ministre. Ce taux est passé à 103 milliards en août dernier et reculera à 102 milliards de dollars à la fin septembre contre un peu plus de 114 milliards en décembre 2016. Le niveau des réserves connaît une constante baisse depuis 2014 concomitamment à la chute des prix du pétrole sur le marché international. Le caractère rentier de l'économie nationale complètement dépendante des hydrocarbures a fini par montrer les limites des politiques prônées par les gouvernements successifs. Devant le refus de recourir à l'emprunt extérieur et la faible réponse de l'emprunt national, aujourd'hui le recours à la planche à billets comblera artificiellement le déficit budgétaire. Des dinars pleuvront sans être soutenus par un effort de production nationale, ce qui aura un effet sur l'inflation pouvant atteindre des taux inquiétants. A noter que le projet de loi de finances pour l'exercice 2018 sera présenté aujourd'hui en Conseil du gouvernement. Une loi qui prévoit un maintien du niveau du budget de fonctionnement contre une hausse de celui de l'équipement, ainsi que l'introduction des «chèques islamiques» dans le Trésor.