Les réformes en Algérie sont à l'arrêt depuis que ce mot a été galvaudé par les tenants du système politique, qui n'entendent s'y souscrire d'ailleurs qu'à la seule condition de se maintenir au pouvoir. Tout le reste n'est à leurs yeux que vain mot ou tentation de conspiration contre «la stabilité» ou les prétendues avancées du pays. Le régime a ainsi fait le choix de tourner le dos à toutes les parties, dans la société, qui chantent les louanges de la critique et est réduit à opposer un silence hautain et de mépris à tous ceux qui s'évertuent à installer le débat sur les sujets de l'heure. La situation politique et financière désastreuse du pays n'a été connue du grand public qu'à partir du moment où le gouvernement était contraint et forcé de lever le secret sur les comptes de l'Etat pour mieux justifier les décisions impopulaires qui allaient en résulter. La déconfiture est donc telle, que le nouveau Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a eu un besoin pressant de communiquer sur le nouveau programme de l'Exécutif, qui plus est (est) intervenu dans une ambiance générale des plus farfelues en raison du limogeage intempestif du Premier ministre Abdelmadjid Tebboune trois mois à peine après sa nomination. La crédibilité du pouvoir est on ne peut mieux entamée à l'heure où l'opinion semble plus que jamais désemparée à cause de la longue maladie du président Bouteflika, des questionnements multiples qu'elle charrie au niveau de la responsabilité des décisions prises au sommet de l'Etat et, surtout, de la légitimité comme de l'efficacité des actions engagées en guise de réponse à la crise. Dans l'histoire récente du pays, jamais l'Algérie n'a autant été mêlée à de sordides jeux de pouvoirs où le potentiel de sortie de crise a été carrément réduit à néant par l'entremise du verrouillage politique favorisé par la Constitution révisée de 2008. Aujourd'hui, tout se passe alors comme si le régime, en perte de vitesse, s'attelle à chercher le second souffle en vue d'atteindre la ligne d'arrivée. Et cela dans tous les domaines. Comme en politique, où il est fait état d'une gestion des affaires de l'Etat pour le moins anachronique et en total déphasage avec la pratique internationale et régionale en vogue, imprimant ainsi un mode de gouvernance de type non conventionnel, le pays étend sa nouvelle stratégie à l'économie, où il bouscule les frontières du réel jusqu'à remettre en cause les lois en vigueur pour se donner bonne conscience. Le scénario se répète aussi dans le domaine de l'énergie en projetant d'exploiter les gisements de schiste ( pétrole non conventionnel) en dépit d'un manque flagrant de débats contradictoire(s) sur les bienfaits d'une telle opération. La logique du pouvoir autoritaire, qui ne s'accommode d'aucune frontière, consiste ainsi à «manipuler» la loi sur la monnaie et le crédit pour se permettre de faire «tourner la planche à billets», là où son système économique conventionnel a failli. Il s'agit ni plus ni moins que de se donner un sursis de quelques années (5 ans ou moins). Le régime, qui joue les prolongations, réédite en économie ce qu'il a réalisé en politique en 2008, en touchant à la Loi fondamentale. Argumentation ? Pour saboter toute opportunité de changement, qui passe nécessairement par le lancement de réformes franchement démocratiques, une vraie solution enfin, on ne s'y serait pas pris autrement.