Jacob Zuma, le président sud-africain auquel le Congrès national africain (ANC) a retiré mardi sa confiance, a désormais jusqu'à aujourd'hui pour démissionner. S'il ne le fait pas, il risque tout bonnement d'être contraint au départ par le Parlement, devant lequel son parti a déposé hier une motion de défiance. Cette motion ouvre la voie à l'élection de Cyril Ramaphosa. Jacob Zuma a déjà survécu à huit motions de défiance grâce à son parti qui possède 249 sièges sur 400 au Parlement. Cela à la différence que maintenant il n'a plus personne pour le soutenir. Le président Zuma a réussi le difficile pari de faire le consensus contre lui. C'est le trésorier général de l'ANC, Paul Mashatile, qui a annoncé la décision de l'ANC lors d'une conférence de presse au Cap. «Nous ne pouvons plus faire attendre l'Afrique du Sud, la décision doit être mise en œuvre et nous devons procéder au processus parlementaire», a expliqué Paul Mahatile, qui a précisé que l'ANC prendra attache avec «les autres partis», notamment ceux qui, dans l'opposition, ont déposé de précédentes motions de défiance contre Zuma. De son côté, Jacob Zuma ne démord pas. Il s'accroche toujours à son poste. «Rien de nouveau n'est apparu. J'ai demandé : “Qu'est-ce que j'ai fait ?” et personne n'est capable de me donner les raisons» qui ont conduit à la révocation, a-t-il déclaré dans une interview accordée hier à la chaîne publique SABC. «C'est très injuste que ce sujet soit soulevé en permanence», a soutenu également Jacob Zuma dans cet entretien au cours duquel il a, plusieurs fois, répété son sentiment que le comité national exécutif (NEC) de l'ANC avait pris une décision «sans preuve». «Je veux que l'on puisse me dire ce que j'ai fait de mal», a-t-il martelé, laissant clairement entendre qu'il n'avait pas l'intention de démissionner. Du moins pas maintenant. Raid policier chez les Gupta Selon le secrétaire général de l'ANC, Ace Magashule, le Président a accepté le principe de se retirer, mais à ses conditions, dans un délai de trois à six mois, ce que l'ANC juge inacceptable. «Nous ne lui avons donné aucune date butoir» mais «je sais que le Président va répondre demain» (hier, ndlr) à l'ordonnance du parti de quitter le pouvoir, a précisé Magashule, qui plaide en faveur d'une solution à l'amiable. «Nous le respectons comme un chef qui a contribué au combat de libération (contre l'apartheid). Il n'y a aucune raison de l'humilier», a-t-il soutenu. C'est donc en théorie la fin pour Jacob Zuma. Le président sud-africain est en situation d'échec et mat. La décision de l'ANC de révoquer le chef de l'Etat intervient au moment (et ce n'est pas un hasard) où la police anticorruption sud-africaine a mené, hier, un raid surprise dans la maison de la famille indienne Gupta à Johannesburg, à l'aube. Trois personnes ont été arrêtées, dont un des frères Gupta. Cette riche famille d'hommes d'affaires, amie du président Jacob Zuma, est accusée d'avoir profité de ses liens avec le chef de l'Etat pour s'enrichir frauduleusement avec la complicité du Président. Ils sont au cœur d'une enquête pour détournement et trafic d'influence. Selon la presse locale, 220 millions de rands (15 millions d'euros) auraient été détournés au profit de la fratrie. Tous les analystes politiques sud-africains s'accordent néanmoins à dire que «cette opération policière est un avertissement pour le chef de l'Etat qui signifie qu'il n'est plus protégé comme il l'était dans le passé». Autrement dit, lui et sa famille pourraient être inquiétés s'il s'entête à s'accrocher à son fauteuil de Président.