Nichées dans les dunes, dans la périphérie lointaine des villes, El Ogla, dans la wilaya d'El Oued et Sidi Mahdi, dans la wilaya déléguée de Touggourt sont frappées par une flambée inédite de rougeole. Une épidémie digne du siècle dernier qui a instauré un climat de panique générale et de désolation dans ces zones rurales et frontalières qui se retrouvent aux devants de la scène avec une image désolante de populations malades, livrées à elles-mêmes et en attente d'équipes médicales mobiles venus apporter des soins et un espoir de rétablissement après la recrudescence du nombre de cas confirmés et de décès. Des centaines d'enfants malades, des adultes qui ne savent plus s'ils ont déjà attrapé cette maladie ou pas, d'autres qui ne la pensaient pas aussi virulente, aussi mortelle. Le bilan actuel fait état de 895 cas confirmés à El Oued et 645 à Ouargla. Les complications de cette maladie ont engendré 12 décès au Souf majoritairement à El Ogla et particulièrement Rebaba. 1 seul décès est à déplorer dans la commune de Rouissat prés de Ouargla et encore, il s'agirait d'une immunodépression consécutive à une maladie infectieuse que la rougeole est venue compliquer à en croire le dernier point de situation de la direction de la santé de Ouargla. Eloignées des centres de soin, les zones frappées par la rougeole ont nécessité le déploiement d'une campagne mobile de vaccination tous azimuts qui a touché 130 000 personnes à Ouargla et 83 466 à El Oued. Dans ces zones qu'on dit «réfractaires à la vaccination, l'inévitable nuée de poussière qui accompagne ce début de printemps plonge les habitants dans un chagrin indicible qui dit leur désarroi devant l'ampleur de la catastrophe. La commission d'enquête dépêchée par la tutelle pour s'enquérir du dispositif de prévention déployé dans ces wilayas a sillonné les zones infestées par la maladie. La commission qui comptait Aziza Hendel, spécialiste des maladies infectieuses à la direction générale de la prévention au ministère de tutelle et Amel Boughoufala, spécialiste à l'Institut national de la santé publique , la commission s'est enquis de la situation épidémiologique depuis l'apparition du premier cas confirmé le 5 février dernier et rendu visite aux adultes hospitalisés au service des maladies infectieuses de l'établissement public hospitalier Benamar Djillani ainsi que les enfants regroupés à l'établissement hospitalier Mère-enfants Bachir Bennacer. Mais c'est surtout les populations nomades et rurales habitant les villages et lieux-dits confinés qui ont fait l'objet de visites systématiques accompagnant les équipes médicales mobiles chargés de la campagne de vaccination de rattrapage notamment dans les zones frontalières qui sont les plus touchées par cette épidémie. La commission d'enquête qui a fait un point de situation, mercredi à Ouargla avant de se rendre à El Oued devra rendre au ministre de la santé ses rapports détaillés sur la situation épidémiologique prévalant dans ces wilayas dans le but de mettre en place d'autres mesures préventives et d'accompagnement de l'effort maitrise de la rougeole. Malgré la cote d'alarme, les autorités sanitaires de Ouargla refusent de baisser les bras et céder à la panique Epidémiologiste, le Dr Djamel Mammeri, chef du service prévention à la direction de la santé de Ouargla parle d'une centaine de cas ayant transité par les hôpitaux de Ouargla, Touggourt et Hassi Messaoud qui, contre toute attente a enregistré une flambée ces deux dernières semaines avec des cas de complications aigues notamment chez les enfants de moins de 12 mois. « La situation est sous contrôle » se plait à dire Mammeri qui veut travailler dans le calme. « Je suis un homme de terrain et je ne veux pas céder à l'échec de la campagne de vaccination de Mars 2017 qui a enregistré seulement 6% d'adhésion ». Rattrapage oblige, y compris chez les familles qui ont refusé de se faire vacciner de prime abord avant de revenir malades et affaiblies aux centres de soins. La campagne effectuée du 21 décembre au 7 janvier a enregistré 45% de réussite, « sans aucune complication ce qui certifie l'efficacité du vaccin répondant aux normes de l'OMS » tient à rappeler le Dr Djamel Mammeri à l'intention des voix qui remettent en cause la qualité des vaccins indiens. La moitié des cas confirmés de rougeole enregistrés durant la flambée épidémique sont des enfants de moins 12 mois, la vulnérabilité des personnes touchées a atteint son summum à Sidi Mahdi dans la périphérie de Touggourt ainsi qu'à Bennaceur, entre Ouargla et El Oued. La campagne de rattrapage cible l'entourage des malades pour ceinturer les zones proches d'El Oued par excès plutôt que par défaut. Mais par quoi expliquer cette réfraction à se faire vacciner et quelles solutions sont préconisée ? Dr Mammeri avance d'abord la panique causée par le décès de deux nourrissons l'année dernière à Alger dans une clinique privée, les messages négatifs et porteurs de rumeurs par certains médias et associations qui ont relayé des informations non vérifiées et des appels au boycott de la vaccination qui a malheureusement très bien fonctionné malgré les campagnes de sensibilisation. Parler aujourd'hui d'inefficacité du dispositif de vaccination, de vaccins indiens inopérant et de retour des maladies de la pauvreté et de l'insalubrité est faux selon notre interlocuteur. « En 2018, les algériens re découvrent que la rougeole tue et que la solution est tous simplement la vaccination » conclut-il. A Ouargla, l'inhumation mercredi soir d'une couple de grands brules deces à l'hôpital de Douera coïncidant avec cette flambée de rougeole a remis sur la table le débat sur l'efficacité de la couverture sanitaire dans le sud du pays mais aussi et surtout l'exigence d'un hôpital des grands brulés dans cette zone pétrolière.