Des combattants rebelles et des civils devaient quitter hier des territoires rebelles dans la Ghouta orientale, une faction islamiste ayant annoncé un premier accord d'évacuation avec le régime qui poursuit une offensive meurtrière contre le dernier bastion insurgé aux portes de Damas. Les sorties devaient commencer à 05h GMT, selon l'annonce faite par le groupe rebelle islamiste Ahrar al-Cham, qui contrôle la poche rebelle de Harasta, à l'est de Damas. L'opération a toutefois pris du retard. Des soldats des armées russe et syrienne étaient stationnés sur une place poussiéreuse, près d'ambulances immobilisées. Les sorties interviennent en vertu d'un accord passé avec le pouvoir de Bachar al-Assad et négocié par son indéfectible allié russe, alors que les territoires rebelles dans la Ghouta ont été laminés par une opération dévastatrice initiée le 18 février. En plus d'un mois de bombardements aériens d'une rare violence et de combats au sol, l'enclave rebelle s'est réduite comme peau de chagrin et les forces du régime en ont déjà conquis plus de 80%. Le déluge de feu quotidien a tué plus de 1500 civils dont 315 enfants, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Quelque 1600 combattants et des milliers de membres de leur familles doivent quitter Harasta, en plusieurs vagues, selon un membre du «comité de réconciliation» du régime syrien, impliqué dans les négociations. Civils et rebelles, ces derniers munis de leurs armes, seront transférés vers le nord-ouest du pays, probablement dans la province d'Idleb qui échappe encore au contrôle du régime Assad. Sur la route menant de Damas à Harasta, dont une partie est déjà sous contrôle du régime, des dizaines de bus blancs étaient garés sur le bas-côté en attendant le début des évacuations. Négociations Pour l'expert sur la Syrie Nawar Oliver, les rebelles de Harasta sont acculés: «Ils n'ont pas réussi à imposer une seule de leurs conditions. La Russie leur a dit, voici ce qu'il y a sur la table. Si ça ne vous plaît pas, on va poursuivre l'offensive terrestre». Le secteur de Harasta, adjacent à Damas, est le plus petit et le moins peuplé des trois poches rebelles qui subsistent dans la Ghouta orientale, à l'est de la capitale. La grande ville de Douma reste encore sous le contrôle du puissant groupe rebelle islamiste Jaich al-Islam. Une délégation locale mène des négociations pour déterminer le sort de la ville. Des centaines de civils ont quitté Douma hier, pour la deuxième journée consécutive, a précisé l'OSDH. Et dans le sud de l'enclave, la poche contrôlée par un autre groupe rebelle islamiste, Faylaq al-Rahmane, était hier encore le théâtre de frappes aériennes meurtrières, selon l'OSDH. L'évolution dans la Ghouta rappelle ce qui s'est passé dans d'autres fiefs rebelles reconquis ces dernières années par le régime, dont celui de la ville d'Alep fin 2016. A l'issue de bombardements intenses et de sièges asphyxiants, les insurgés de ces localités et les civils les soutenant avaient été mis dans des bus, direction Idleb. Amnesty International dénonce des déplacements forcés de populations. Multipliant ainsi les victoires face aux rebelles, mais aussi face aux jihadistes, le pouvoir d'Assad, appuyé par ses alliés russe et iranien, a déjà reconquis plus de la moitié du territoire syrien. Dans la Ghouta, l'opération du régime a déjà fait plus de 70 000 déplacés selon l'OSDH. Ces derniers n'ont d'autre choix que de rejoindre des secteurs du gouvernement, malgré la crainte de représailles pour certains. Ils s'entassent dans des centres d'accueil hâtivement mis sur pied dans les territoires du régime, où ils vivent une «situation tragique», a dénoncé mercredi un représentant des Nations unies. «Il est vrai que les gens ont fui les combats, la peur et l'absence de sécurité, mais ils se retrouvent dans des endroits où ils ne peuvent pas se laver, cela ne devrait pas être le cas», a déploré le coordinateur humanitaire de l'ONU en Syrie, Ali al-Zaatari. Avant l'offensive du régime, l'enclave rebelle était déjà le théâtre d'une grave crise humanitaire: ses quelque 400 000 habitants, assiégés depuis 2013, subissant au quotidien de graves pénuries de nourriture et de médicaments. Dans le nord-ouest, l'armée turque a lancé le 20 janvier une offensive pour chasser de sa frontière la milice kurde des Unités de protection du Peuple (YPG), prenant le contrôle total de l'enclave d'Afrine.