Le hall attenant à la salle d'audience de la cour criminelle d'Oran a été aménagé pour permettre à un grand nombre de personnes de suivre le procès relatif à l'affaire BCIA qui a été entamé hier. Pour les journalistes, le petit écran plaqué sur le mur, à côté de la porte d'entrée, n'a pas été commode à cause des va-et-vient, des grincements des portes et des défections de la sonorisation à l'extérieur, mais ils ont pu accéder à la salle dans l'après-midi. Durant la séance matinale, après l'installation d'usage des jurys, les avocats ont émis quelques réserves concernant les accusés qui ont introduit un pourvoi en cassation de l'arrêt de renvoi. Ils étaient 4 au départ, mais deux autres accusés, détenus, ont introduit des pourvois pour les mêmes raisons et la Cour suprême n'a pas également statué sur ces cas apparus en juillet 2006, selon un des avocats. Ceci porte le nombre d'accusés (y compris ceux déclarés en fuite) à 51. Après délibération, le président de la cour a concédé à la défense que tant que la Cour suprême n'aura pas statué, les inculpés concernés ne seront pas cités à la barre. Il se basera sur les articles 278 et 499. Le staff dirigeant de la BCIA sera donc absent à l'audience, sauf en qualité de témoin laissée à l'appréciation de la cour. Mais cette situation a laissé perplexe plus d'un. « Ils sont accusés mais pas concernés », devait-il déclarer, parlant des derniers. Le juge a également refusé le renvoi du procès demandé par des avocats, du fait sans doute que maintenant les conditions sont réunies. Quant à la liste des témoins demandée par certains avocats dont l'ancien directeur général de la BEA, le juge a déclaré que la cour convoquera toute personne susceptible d'apporter un témoignage pouvant éclairer l'affaire. Cette dernière est complexe et la séance de l'après-midi a été réservée à la lecture de l'arrêt de renvoi rédigé sur une centaine de pages. Le 22 mai 2003, le directeur régional de la BEA, Baghdadi Djamel, a porté plainte contre les dirigeants de la BCIA qui a refusé d'honorer le montant des traites avalisées de 4,2 milliards de dinars. Le directeur régional de la BEA n'a été informé par son subalterne de ce refus que six jours après et c'est parce qu'il n'a pas été convaincu des explications données par son subalterne en présence du directeur de l'agence 74 (dite Yougoslavie) que l'affaire a été portée à la police. Selon l'arrêt de renvoi, un certain nombre d'opérations illégales avait pour but de rendre complexes les opérations bancaires pour bénéficier des liquidités au détriment de la BEA. Les inspections internes ont révélé que le montant du préjudice pour la seule agence 74 est de plus de 7 milliards de dinars, sans compter les intérêts. « L'enquête de police a abouti à la conclusion que des responsables de la BEA, en complicité avec les responsables de la BCIA et des commerçants particuliers, ont exécuté un plan étudié pour bénéficier de liquidités », est-il également noté. Apparentées au délit de cavalerie, les traites d'un mois couvraient les traites du mois précédent et ainsi de suite. C'est ainsi que de grosses sommes restaient en dehors du circuit légal jusqu'à ce que la BCIA se retrouve dans l'incapacité de couvrir le trou financier. Des clients domiciliés à la BCIA cités dans cet arrêt ont signé des traites pour lesquelles ils n'ont reçu aucune marchandise. Entre 2000 et 2003, le mouvement des capitaux enregistré par la société Sotrapla a dépassé dix fois son chiffre d'affaires, sans que l'alarme soit donnée. Aux traites avalisées et les opérations commerciales fictives s'ajoutent les chèques sans provision. La BCIA aurait servi d'exemple à Union Bank qui aurait usé du même stratagème des traites avalisées pour engranger des liquidités. En résumé, le préjudice des traites avalisées pour l'agence d'Oran est évalué à 6 791 226 750 DA, celui de l'agence de Sig à 2 891 669 378 DA, les traites avalisées par Union Bank à 500 000 000 DA, les avances à 1 550 000 000 DA, les chèques de garantie 1 033 680 000 DA, ce qui donne un total de 12 766 576 128 DA.