Les titulaires de livrets d'épargne domiciliés dans les agences de la Cnep-Banque en sont arrivés à regretter d'avoir confié leurs économies à cette institution qui semble avoir totalement perdu de vue sa vocation première de collecteur d'épargne, pour se complaire dans celle d'une administration bureaucratique qui considère l'épargnant, non pas comme un client à fidéliser, mais comme un usager d'un service public incontournable. Les cas de défaillances sont nombreux dans cette institution qui a, il est vrai, connu une valse de directeurs généraux, mais il en est un qui frôle la démence et montre à quel point les centres de décision de la Cnep-Banque fonctionnent en vase clos, sans se soucier de l'impact, pour le moins désastreux, des instructions qu'ils donnent aux agences en contact avec le public. C'est le cas avec la décision visant à mettre fin aux carnets d'épargne traditionnels pour les remplacer par des « livrets électroniques » permettant, dit-on, une gestion plus moderne. Lancée il y a environ une année sans aucune information, l'opération a pris de court les épargnants qui, du jour au lendemain, ne peuvent plus utiliser leur livret d'épargne, obligés qu'ils sont de constituer un dossier administratif et d'attendre qu'un nouveau livret leur soit délivré. Les économies des épargnants se sont subitement retrouvées gelées, mettant notamment dans la gêne les petits épargnants qui ont régulièrement besoin de liquidités pour boucler les fins de mois. Leurs déboires ne s'arrêtent malheureusement pas là, la direction générale de la Cnep-Banque ayant instruit ses agences à l'effet de bloquer également le calcul des intérêts produits jusqu'en mars prochain. Ceux qui se sont présentés à leur agence pour déposer leurs dossiers en vue d'acquérir le « livret électronique » ou, tout simplement, pour le calcul des intérêts, se sont vu rembarrer sans ménagement et sans qu'aucune explication ne leur soit donnée par les préposés aux guichets qui n'en savaient certainement pas plus. Ils leur demanderont de revenir plus tard sans toutefois leur préciser quand, ne pouvant dans l'intervalle qui peut durer plusieurs mois opérer ni retrait ni dépôt de leur livret. Les épargnants ainsi malmenés sont nombreux à demander la clôture de leur livret, nous apprend un agent de la Cnep qui précise que les agences ne peuvent même pas leur rendre ce service, car même pour clôturer son compte, l'épargnant est obligé d'attendre que l'agence reçoive l'ordre de la DG, de calculer les intérêts, indispensables aux calculs du solde de clôture. A noter que dans aucune des trois agences de la capitale où nous nous sommes rendus ne figure, comme par le passé, une affiche indiquant les taux d'intérêt offerts aux détenteurs de livrets d'épargne. Tous les clients, sans exception, auxquels nous avons posé la question étaient dans l'ignorance totale du pourcentage que la Cnep-Banque est censée accorder à leur dépôt. Ils affirment disposer d'un livret depuis longtemps et qu'ils continuent à le faire par habitude, même s'ils reconnaissent tous assister depuis ces dernières années à une dégradation de plus en plus insupportable de la qualité du service. Le plus grave est que la plupart des épargnants lésés par les dysfonctionnements de la Cnep-Banque lient la régression constatée à la réforme bancaire censée pourtant produire l'effet inverse. Ne serait-ce que pour redonner crédit à cette réforme qui a suscité tant d'espoirs, il est important que la direction générale de la Cnep-Banque replace la dignité de ses épargnants au cœur de ses principales préoccupations.