Lancée par le chef du gouvernement espagnol, Rodriguez Zapatero, en septembre 2004, et appuyée vite par les Nations unies, l'idée de l'alliance des civilisations a pris forme hier avec l'ouverture à Madrid d'un forum visant à contrer « l'intolérance, le radicalisme et le fondamentalisme », selon les termes de M. Zapatero. « L'alliance des civilisations prétend démontrer qu'il existe des voies pratiques de collaboration entre le monde islamique et le monde occidental qui démentent l'idée supposée d'affrontement inévitable entre civilisations et cultures », a-t-il expliqué lors d'un discours inaugural. Cette idée a reçu l'adhésion de plus de 70 pays. « Il est facile de parler de confiance mutuelle, de tolérance, d'amitié interculturelle. Il est beaucoup plus difficile de traduire ces mots en actions », a admis, en revanche, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. Mais il a aussi insisté sur la nécessité et l'urgence de ce dialogue, en évoquant « la terrible intolérance dont souffre le monde victime d'attaques, d'assassinats et d'atrocités massives commises au nom de la religion ». Pour sa part, le Premier ministre turc a souligné que « l'objectif est de combler une lacune dans un monde où l'intolérance augmente », en déclarant qu'un succès concret de cette alliance en ferait « un antidote au terrorisme ». L'alliance des civilisations rassemble quelque 350 personnalités en provenance de plus de 60 pays. Parmi elles figurent le prix Nobel turc de littérature, Orhan Pamuk, l'Iranienne prix Nobel de la paix, Shirin Ebadi, l'écrivain brésilien Paulo Coelho, la reine Noor de Jordanie et le secrétaire de la Ligue arabe, Amr Moussa. Plusieurs initiatives vont être présentées à Madrid. L'ONU va lancer une banque de données internet pour fournir des informations sur « qui fait quoi » dans le domaine de la compréhension interculturelle. La réunion de Madrid doit aussi annoncer la création d'une plateforme en ligne destinée aux médias pour leur permettre d'obtenir rapidement des commentaires de spécialistes. Cet outil doit aider, selon l'ONU, à « réduire les tensions en cas de crise en matière de dialogue interculturel », à l'image de celles provoquées dans le monde musulman par la publication en Europe de caricatures du Prophète Mohamed (QSSSL). Le Qatar a annoncé la création d'un réseau doté de 100 millions de dollars pour aider les jeunes Arabes du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord à trouver du travail ou à fonder leur propre entreprise, afin de contrer la « frustration » et la « marginalisation » de jeunes générations arabes. De son côté, le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, qui a pris part au forum, a indiqué que l'Algérie a accueilli « favorablement cette initiative, et nous œuvrons à dépasser le stade des discours pour aller vers des actions concrètes, des mesures pratiques que doivent prendre les gouvernements pour rapprocher les peuples entre eux et lutter contre l'islamophobie ».