L'histoire ne ressemble pas à celle de Cain et d'Abel. Ni encore le mobile qui avait amené le fils d'Adam à tuer son frère Abel et tel que rapporté par les Ecritures monothéistes : la jalousie. Néanmoins, le mis en cause est jugé le 15 avril 2008 pour fratricide, c'est-à-dire le meurtre d'un frère. Toutefois, le tribunal criminel d'Alger sera clément puisqu'il a été établi que l'accusé, la trentaine environ, n'avait pas l'intention de tuer. L'acte était accidentel. Le mis en cause qui a déjà passé six ans en prison laisse entrevoir un large sourire. Est-il satisfait du verdict en ce sens que la cour a décidé d'une peine de trois ans d'emprisonnement ? Sans aucun doute. L'accusé est d'ores et déjà libérable et devra rejoindre les siens au plus tard vingt-quatre heures après son passage devant les juges. Cela dit, il ne cessait pas d'afficher une mine grisâtre. Sans l'ombre d'un doute, son regard absent renseigne de l'état dans lequel il évolue depuis 2002, date de la « disparition » de son frère. « Il ne fait que pleurer. Il n'avait jamais pensé qu'un coup fatal allait toucher son défunt frère. J'ai perdu un fils, je ne veux pas que l'autre moisisse en prison », témoigne la maman, à la silhouette fragilisée. Que s'est-il passé, en cette « sahra » ramadhanesque, dans cette cité populeuse de la banlieue d'Alger ? Le mis en cause, en compagnie d'un groupe d'amis, était attablé dans un café. On discutait de tout et de rien. On rigolait tout en grillant des clopes et sirotant du thé. La journée a dû être un peu pénible pour ces « jeûneurs » convaincus. On n'échangerait pour rien la sympathique soirée, la « sahra », qui caractérise le mois sacré. Tout était « zen » jusqu'au moment où un groupe de jeunes atterrisse sur les lieux. Vociférant des propos injurieux, le groupe était résolu à « corriger » un jeune homme du coin. Le « mobile » était insignifiant. L'homme « recherché » n'avait pas commis un crime qui aurait pu justifier cette charge inattendue. Ayant pris peur, l'homme ciblé devait solliciter l'aide de ses amis du quartier et bien entendu celle de son frère, qui est aujourd'hui accusé de meurtre. Le mis en cause accourt vers la boucherie du coin, ouverte en cette soirée de Ramadhan, et revient précipitamment avec une arme blanche. Son « but » était de défendre son frère. « Dissuader la bande qui en voulait à mon frangin », a-t-il déclaré aux enquêteurs. Malheureusement, obscurité aidant, il a dû « planter » l'arme blanche, « par erreur » dans le corps de son frère. Atteint mortellement, la victime devait rendre l'âme quelques instants plus tard.