Le projet d'ouverture d'une nouvelle artère carrossable, en plein centre ville, n'a pas fait que des heureux. Ainsi, pour désengorger la rue principale qui étouffe de par le nombre important de véhicules qui y transitent quotidiennement, la nouvelle APC a pris la résolution de transformer la ruelle piétonne appelée communément « rue des cordonniers » en une voie praticable aux automobiles. Pour ce faire, il a fallu détruire une dizaine de baraques où se tiennent de petits commerces, notamment des cordonniers, afin d'élargir la chaussée. Ceux qui viennent d'en être délogés, malgré eux, ne cessent de ruminer leur désapprobation. L'idée, en elle-même, aurait pu être applaudie si elle avait été mise à exécution. Or, force est de croire que le projet a été décidé à la hâte puisque plusieurs mois après le début de l'opération, consistant à détruire les étals et autres obstacles, rien n'indique que la rue sera livrée de si tôt. Recouverte de tuf, elle continue à n'être fréquentée que par les piétons. Ce qui n'est pas, on s'en doute, du goût des anciens commerçants transférés 100 m plus loin, vers le lieudit « la dalle du marché » et qui ne cessent de se plaindre. Leurs raisons paraissent légitimes vu que le nouvel emplacement n'est pas accessible à leur clientèle habituelle, essentiellement des femmes qui, pour éviter le centre-ville, empruntent la rue des cordonniers, plus discrète. Un cordonnier qui gagnait suffisamment sa vie, auparavant, affirme n'avoir engrangé que 20 DA en l'espace de quinze jours. Certains autres, comme Madjid, n'ont pas jugé utile de s'installer ne serait-ce qu'une journée, dans ce lieu « où le commerce est pratiquement nul », vu qu'il est complètement isolé et loin des regards. Ces pères de famille, pour la plupart, se retrouvent, sans ressources, du jour au lendemain. « Nous avons accepté, à contre-cœur, la décision de quitter - notre rue- mais nous espérions nous installer dans une rue commerçante de même nature », avoue, déçu, un cordonnier. Il est vrai que, dans le souci de respecter l'ordre public, l'intérêt de la communauté doit primer sur celui des personnes. En revanche, les responsables devraient prendre en considération la situation de ces gens qui n'ont d'autres ressources que ce que leur rapporte le pied-de-biche et le marteau.