Des associations et des syndicats tunisiens ont annoncé la formation d'une coalition pour défendre la liberté de la presse "menacée" et appelé à un rassemblement de protestation le 3 mai, journée mondiale de la liberté de la presse. "Le secteur de l'information et les journalistes sont plus que jamais menacés par les tentatives du pouvoir de restreindre les libertés par le biais de la loi", a déclaré à la presse Néjiba Hamrouni, présidente du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt, autonome). Mme Hamrouni a annoncé la constitution d'une "coalition pour la défense de la liberté d'expression" qui regroupe sept associations et syndicats professionnels, et appelé à un rassemblement le 3 mai pour protester contre un projet de loi soumis à l'Assemblée nationale constituante. Ce projet de loi qui a été présenté par le Congrès pour la République, un allié du parti islamiste Ennahda au pouvoir, prévoit des peines allant de 3 mois à 3 ans de prison pour quiconque critiquerait le président de la République, les membres du gouvernement et les instances qui relèvent de leur pouvoir. Les membres de cette coalition, dont la Ligue de défense des droits de l'Homme, avaient déjà appelé vendredi à "faire face aux tentatives visant à étouffer la liberté de presse et d'expression, principal acquis réalisé depuis la révolution et sans lequel la Tunisie n'a aucune chance d'accomplir une transition démocratique réelle". Le gouvernement dirigé par le parti islamiste Ennahda tente d'"utiliser de nouveau les médias comme instruments de propagande", et d'"empêcher que la réforme du secteur de l'information soit menée conformément aux règles de la profession et aux standards internationaux de la liberté d'expression", selon eux. Le projet de loi contesté "vise à permettre au pouvoir d'avoir une mainmise sur la presse pour échapper à toute critique, et menace le droit à une information libre et professionnelle", a déploré Kamel Laabidi, dirigeant de l'association Vigilance pour la démocratie et l'Etat de droit. "Il faut tout faire pour mettre fin à ce genre de pratiques et aux lois qui mettent en danger la liberté de la presse", a ajouté M. Laabidi, ancien président de l'Instance nationale pour la réforme de l'information et de la communication. Cette instance s'est sabordée en juillet dernier pour protester contre le peu d'empressement du gouvernement pour mettre en oeuvre un programme de réforme des médias, secteur longtemps sous la coupe réglée du régime du président déchu Ben Ali. Les islamistes au pouvoir et les journalistes tunisiens entretiennent des relations tendues, ces derniers accusant régulièrement Ennahda de vouloir domestiquer les médias, tandis que les islamistes se disent l'objet d'acharnement de la part de médias et journalistes tenants du régime déchu.