Qui veut nuire au « printemps » tunisien ? Qui cherche à semer le chaos dans le « seul » pays qui a le moins souffert de sa « révolution » démocratique ? D'où vient cette irruption de violence aux relents salafistes, mais dont les maîtres d'œuvre seraient, selon des analystes tunisiens, les anciens partisans de l'ancien président Ben Ali ? Tunis est-elle en passe de basculer, à son tour, dans le terrorisme islamiste, ou le terrorisme tout court ? Il serait naïf de réduire l'ampleur des « actes terroristes » - selon l'expression du ministre tunisien de la Justice - qui secouent actuellement plusieurs villes du pays, la capitale Tunis en premier, à une réaction « prévisible » des mouvements salafistes en colère contre un événement artistique, dans lequel les principes sacrés de l'islam auraient été blasphémés. Les enjeux, politiques et géopolitiques notamment, y sont autrement plus cruciaux.Quand bien même peut-elle déboucher sur des affrontements violents, comme ce fut le cas il y a quelques moins lors de l'affaire du film Héliopolis, la haine entre islamistes et libéraux n'est pas pour étonner les Tunisiens. Loin s'en faut. Ce sont, en revanche, les redoutables ex-« benalistes » qui font craindre le pire, notamment au parti islamiste au pouvoir Ennahda. « Ces groupes sont infiltrés par des criminels (...) Ce sont les spectres du régime déchu qui tentent de mettre en échec le processus de transition » ont dénoncé, hier, dans un communiqué, les « trois présidences » tunisiennes (République, Assemblée constituante et Gouvernement) en insistant particulièrement sur le contexte de cette flambée de violence. « Ces événements surviennent à un moment où le pays avance vers l'écriture de sa nouvelle constitution et l'édification de ses institutions, où il enregistre des indicateurs économiques positifs et une saison agricole et touristique prometteuse », poursuit le texte officiel. Le message est, après la proclamation de l'état d'urgence, les arrestations en série et l'ordre de tirer sur les « manifestants », on ne peut plus clair : les benalistes sont, bel et bien, les instigateurs des troubles, avec l'aide des islamistes radicaux. D'où la ferme réaction des autorités. Une réaction qui se veut, au-delà de toutes les mesures répressives prises à l'encontre des fauteurs, symbolique : dans matinée d'hier, le tribunal militaire de Tunis a condamné, par contumace, l'ancien dictateur à 20 ans de prison pour « incitation au désordre, meurtres et pillages sur le territoire tunisien ». Le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi, a, pour sa part, exclu qu'al Qaïda soit derrière ces violences, en réponse à l'appel au soulèvement lancé par Ayman Al-Zawahiri à son encontre...