Quelle attitude peut adopter l'Algérie face aux développements, pour le moins inquiétants, que connaît la Tunisie, qui rappellent étrangement ce qu'elle a vécu au début des années quatre-vingt-dix ? Tour à tour, les pays limitrophes de l'Algérie plongent dans des situations sécuritaires dangereuses, dont les répercussions négatives sur notre pays sont inévitables. Après la Libye et le Mali, c'est au tour de la Tunisie de vivre des difficultés du même ordre. Au vu des informations en provenance de ce pays, la situation est vraiment grave comme en témoigne le nombre élevé de blessés et surtout la première victime, un jeune homme de 22 ans décédé de ses blessures après avoir été atteint d'une balle dans la tête au cours d'affrontements mardi entre des groupes salafistes et les forces de l'ordre, à Sousse. D'ailleurs, les “trois présidences” tunisiennes, à savoir la République, l'Assemblée constituante et le gouvernement, ont dénoncé hier des “groupes extrémistes qui menacent les libertés” mais ont aussi condamné “l'atteinte au sacré”, en référence à une exposition à l'origine de ces violences. Ceci étant, les salafistes réprimés sous Ben Ali, déçus par la gouvernance du parti Ennahda, ne ratent désormais aucune occasion de se mettre en évidence comme ce fut le cas lorsqu'ils se sont attaqués à la chaîne de télévision Nessma quand elle a diffusé le film iranien “Persépolis”. Aujourd'hui, ils semblent avoir répondu à l'appel lancé par le nouveau chef de la mouvance terroriste Al-Qaïda, l'Egyptien Ayman Zawahiri, à se soulever contre le pouvoir en place du parti islamiste tunisien, parce qu'il refuse d'appliquer la charia. Réagissant à cet appel de soulèvement, son chef spirituel, Rached Ghannouchi, a affirmé hier qu'Al-Qaïda “n'avait pas d'influence en Tunisie”. Une chose est désormais sûre, les salafistes menacent la stabilité de la Tunisie. Et cela ne peut laisser l'Algérie de marbre, d'autant plus qu'elle a apporté tout son soutien et des aides en tous genres aux nouvelles autorités tunisiennes après la chute de Zine Al-Abidine Ben Ali. L'accueil royal réservé au leader d'Ennahda à tous les niveaux de l'Etat, alors qu'il n'occupe aucune fonction officielle dans son pays, atteste on ne peut mieux de la volonté de l'Algérie de venir en aide à son voisin de l'Est. Il faut dire aussi que la situation est grave en Tunisie, d'où les craintes d'un débordement à nos frontières orientales, car c'est ce qui est arrivé lorsque la Libye et le Mali ont connu des troubles similaires. En plus de la gestion du flux des réfugiés fuyant vers nos villes frontalières, il y a aussi les incidents armés, qui menacent nos citoyens des deux côtés de la frontière. En outre, ce qui arrive en Tunisie, l'Algérie l'a déjà vécu en juin 1991 et ses traces n'ont pas encore totalement disparu, d'où l'obligation pour les responsables algériens de demeurer sur leurs gardes. En effet, ce qui importe le plus, c'est de rester vigilants, parce que les salafistes tunisiens, dont la présence d'un certain nombre d'entre eux dans des villes de l'est algérien a été signalée, attendent beaucoup de leurs “homologues” algériens, auxquels ils ont réclamé leur soutien. Il ne fait aucun doute qu'avec son expérience en la matière, l'Algérie saura comment venir en aide à la Tunisie, plus que jamais menacée par le salafisme. M. T.