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Avortement illégal à 90.000 DA
Ouverture, hier, du procès au tribunal criminel d'Alger
Publié dans Horizons le 07 - 01 - 2013

Un réseau spécialisé dans l'avortement illégal dans la capitale a été démantelé suite au décès d'une jeune fille, âgée à peine de 21 ans, suite à une intervention dans un cabinet clandestin, géré par un infirmier en retraite et sa famille. Le réseau est composé de neuf individus dont 4 femmes poursuivis par le tribunal criminel près la cour d'Alger, présidé par le magistrat Brahim Kharabi. M. Mahmoud et S.Youcef, agents de service au niveau de l'hôpital de Kouba, M. Karima, couturière, M. Noura, sage-femme, M. Djamel, agent à la pharmacie de l'hôpital de Beni Messous, M. Zineb, infirmière retraitée, H. Samira, M. Hadda sans profession se sont présentés, hier, à la barre pour répondre aux chefs d'inculpation « d'avortement ayant entraîné la mort, participation dans l'avortement et tentative d'avortement illégal ». Les faits de cette affaire remontent au mois d'octobre 2011. Un couple fiancé confronté à une grossesse non désirée, décida l'avortement. La fille B. Hanane a réussi en premier lieu à se procurer un comprimé d'avortement à 5.000 DA chez la nommée M. Karima, une couturière résidant à Gué de Constantine qui activait, selon l'enquête policière, avec un réseau de prostitution. A son grand malheur, le comprimé n'a pas été efficace. Elle décida alors de prendre trois autres comprimés à 15.000 DA, mais devant son inefficacité, le fiancé M. Mahmoud a dû payer les services d'un infirmier Kh. Djamel exerçant à l'hôpital de Béni Messous. « C'est un jeune de mon quartier qui me l'a indiqué », dira le fiancé au magistrat. Ce dernier l'orienta vers un « spécialiste ». Il s'agit en réalité d'un infirmier en retraite qui pratiquait l'avortement illégal dans une cave aménagée en clinique dans sa villa à Bouzaréah. La complicité de sa femme et de ses deux filles, âgées de 24 et 34 ans a été confirmée par les enquêteurs. Ce dernier lui exigea une somme de 90.000 DA, car la grossesse était avancée (4 mois) avant qu'elle ne soit fixée après « négociations » à 65.000 DA. M. Mahmoud avait reconnu lors de son audition par le tribunal criminel que l'infirmier lui a confié qu'il était un médecin et que sa femme était une gynécologue et qu'il avait sa propre clinique. « Je ne savais pas qu'elle allait mourir (...). C'est elle qui insistait sur l'avortement, moi je voulais assumer ». Une réponse qui irrita le juge Kharabi qui s'écria : « Vous avez tué un bébé. Il avait 4 mois et il était formé. C'était votre enfant et vous deviez assumer puisque vous êtes son fiancé ».
« Je ne savais pas qu'elle allait mourir »
Le jour de l'intervention, la fille se présenta à la villa vers 10 h 00. Elle sera conduite vers la cave aménagée en « bloc » opératoire et elle fut soumise à l'avortement dans des conditions sanitaires médiocres et sous le suivi et l'observation des deux jeunes sœurs qui n'ont aucune formation médicale. L'état de la fille s'était compliquée. « La victime ne respirait pas, était très pâle et frémissait de froid », déclara le fiancé. On l'avait alerté vers 16 h 00. Elle sera transférée en urgence à l'hôpital de Baïnem. Selon le rapport du médecin légiste, la fiancée a rendu l'âme 36 heures avant son admission à l'hôpital, suite à une hémorragie provoquée par un avortement dans des conditions médiocres et des complications respiratoires et cardiaques. Alertés, les éléments de la division Ouest de la police judiciaire de la sûreté de wilaya d'Alger ont déclenché aussitôt une enquête qui a abouti à la neutralisation du réseau et la saisie d'une quantité importante de comprimés détournés des services de maternité ainsi que des équipements nécessaires pour la pratique de l'avortement. Selon l'enquête, le vieux infirmier prenait l'allure d'un homme pieux, barbu et ses filles portaient le « jilbab » pour tromper son voisinage et ne pas attirer des doutes sur les visites récurrentes et suspectes de jeunes filles chez lui. Ce dernier a reconnu, hier, les faits affirmant qu'il a agi « seul » et sa femme et ses deux filles étaient chez une parente à Boumerdès. « Je l'ai fait liwajh rabbi (pour le Bon Dieu). Le fiancé m'a saisi en sanglots. Il craignait que son beau-père l'égorge ». Toutefois, il ne pouvait pas échapper aux questions pertinentes du procureur général qui lança cette interrogation. « Comment se fait-il qu'on t'ait saisi, toi, alors que tu es en retraite ? Et de déduire : « Cela montre que t'es connu dans le milieu pour ces pratiques ! » L'accusé se tut en affirmant qu'il a toujours fait du bien aux malades du quartier. L'audition des accusés s'est poursuivie, hier, jusqu'à une heure tardive. L'avortement clandestin en Algérie devient de plus en plus courant. Des réseaux ont été démantelés à Draria, Chéraga , Hussein-Dey à Alger et dans les wilayas de Sétif et M'sila. Ces réseaux sont bien structurés et agissent avec l'appui précieux de sages-femmes, de médecins, d'infirmiers. Des jeunes filles, parfois, mineures, ont recours à ces réseaux pour mettre fin à des grossesses non désirées, mais dans plusieurs cas, elles perdent la vie. Affaire à suivre ...


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