L'ex-chef de l'armée Abdel Fattah al-Sissi, qui a remporté la présidentielle égyptienne avec plus de 96% des voix, entame un parcours politique difficile. Il a à diriger le pays arabe le plus peuplé et dont l'économie est au point mort. Avec les 23 millions de personnes ayant voté pour lui, le nouvel homme fort en Egypte a obtenu 10 millions de voix de plus que Mohamed Morsi, le président destitué l'année passée après des manifestations hostiles au pouvoir des Frères musulmans. Son unique concurrent, Hamdeen Sabbahi, crédité de 3,8% des voix, a reconnu jeudi sa « défaite ». Se disant « respecter la volonté populaire », il affirme néanmoins « ne pas accorder de crédibilité » au nouveau Raïs. La coalition pro-Morsi s'est élicitée d'avoir remporté « la victoire dans la bataille des bureaux de vote vides », y voyant « la chute du coup d'Etat militaire ». 47% des électeurs s'étaient présentés aux urnes contre plus de 51% lors de la présidentielle de 2012. A la fin du deuxième jour du scrutin mardi, seulement 37% des Egyptiens avaient exprimé leurs voix. D'où la prolongation de l'opération d'une journée. Les analystes ont été plus virulents envers ce scrutin. Le chercheur au Saban Center américain, Shadi Hamid, a fait remarquer que dans l'immédiat « nous n'avons aucun moyen de vérifier les chiffres du gouvernement, il n'y a aucun comptage parallèle et pas assez d'observateurs internationaux ». Si « les médias officiels ont contribué à forger à Sissi une légende de sauveur et d'homme providentiel, ce matraquage n'a pas suffi à mobiliser les masses », le privant du « plébiscite qu'il espérait », analyse Karim Bitar, directeur de recherche à l'Institut des relations internationales et stratégiques en France. Human Rights Watch a souligné pour sa part « le climat de répression qui sape gravement l'impartialité de cet élection », rappelant les « milliers d'arrestations d'opposants, islamistes et laïques, qui ont verrouillé l'espace politique et privé le scrutin de toute signification ». Les observateurs de l'Union européenne ont estimé que cette élection avait « respecté la loi » mais ont regretté l'absence de « certains acteurs » de l'opposition. Washington, qui maintient son aide au Caire, a fait part de son inquiétude quant au climat politique ayant précédé le scrutin.