La fin de l'épisode tumultueuse du CGN, en fin de mandat depuis février 2014 et marqué par l'empreinte indélébile des islamistes désavoués in fine par la Cour suprême réhabilitant le gouvernement d'Abdallah El Thani, nourrit l'espoir d'un retour à la démarche consensuelle pour dépasser les faux clivages, mettre fin à la désastreuse situation anarchique et se consacrer pleinement au rétablissement de la stabilité. Sous la pression de la rue, le passage de témoin qui consacre un nouveau parlement dûment mandaté et à la légitimité retrouvée comble un déficit démocratique jusque-là au bénéfice exclusif des milices de tout acabit. Les idéaux de la nouvelle Libye, vantés il y a 3 ans, vont-ils suppléer le règne calamiteux des « seigneurs de la guerre » et le péril montant du terrorisme aux aguets ? L'enjeu est décisif dans ce scrutin de l'avenir et de la transition démocratique remise sur les rails. De grands chantiers se présentent pour jeter les bases de la reconstruction nationale et mettre en place des institutions crédibles. Outre le CGN revu et corrigé, la formation d'un gouvernement et le lancement du processus électoral (les élections générales en 2015) sont particulièrement attendus pour amorcer le sursaut salvateur. Le challenge incontournable de la stabilité et des réformes démocratiques est confronté au défi de la violence érigée en mode de gouvernance. « Il y a un risque que le scrutin soit perturbé, voire reporté dans certains bureaux de vote, notamment à Benghazi et Derna (est) », les fiefs des groupes islamistes radicaux, renchérit une source au sein de la Haute commission électorale (HNEC). La « trêve » annoncée par le général Khalifa Haftar, en guerre contre « le terrorisme », sera-telle respectée par les mouvements islamistes ? Un plan de sécurité a été toutefois confié au ministre de l'Intérieur et le chef de l'état-major pour garantir un déroulement normal d'un scrutin aux appréhensions certaines et justifiées par le climat de violence. A cet effet, qualifiant le scrutin d'« étape importante dans la transition du pays vers une gouvernance démocratique stable », le Conseil de sécurité, « très inquiet des divisions politiques et de l'aggravation de la situation en matière de sécurité », a exhorté les Libyens à assurer la tenue pacifique des législatives et a demandé à « toutes les parties de s'assurer que les élections se tiennent de manière pacifique dans tout le pays et que tous les Libyens soient à même d'exercer leur droit de participer au scrutin ». Les 15 du Conseil de sécurité ont également invité « toutes les forces politiques en Libye qui rejettent le terrorisme et la violence à dialoguer pour forger un consensus sur les prochaines étapes et priorités de la transition démocratique ». De son côté, l'Union européenne plaide pour des élections « ouvertes à tous et crédibles » qui permettent la constitution d'un « Parlement capable d'incarner un consensus national et de jouer son rôle dans la formation d'un gouvernement bénéficiant d'un large soutien politique ». Indéniablement, dans ce scrutin de la dernière chance, les Libyens (1,5 million d'électeurs contre 2,7 en 2012), appelés à élire les 200 membres (32 sièges pour les femmes) de la chambre des représentants parmi les 1.628 candidats « individuels » participent au choix cornélien de la Libye stable et unie ou d'une issue chaotique aux conséquences dramatiques.