On connait la musique arabo-andalouse, dans son expression algérienne, à travers ses trois courants classiques, à savoir l'école d'Alger (çanaa), celle de Constantine (Malouf) et enfin l'école de Tlemcen (Gharnati) qui constituent, en gros, son ossature. Patrimoine immatériel citadin par excellence, dont ces trois grandes qui assurent un monopole presque sans partage sont les fiefs, voilà qu'en guise de surprise et de témérité aussi, un vent du sud venant, contre toute attente, et à la surprise générale, réchauffer l'atmosphère d'un art réputé placide et hermétique. Une nouveau souffle d'espoir incarné par l'association el-Mizharia de Laghouat dont le passage, jeudi soir, à la salle Ibn Zeidoun (Oref) à Alger (dans le cadre du 9e Festival International de la Musique Andalouse et des Musiques Anciennes) a été, tout simplement, époustouflant. Emmitouflés dans des Kachabias, de haute couture et facture- une première dans les annales de la scène andalouse, les membres de la troupe laghouatie ont donné, une heure durant, une prestation magistrale qui a laissé pantois plus d'un parmi le public venu nombreux découvrir la surprise du soir. Accoutrement atypique, le récital l'était on ne peu mieux, déroutant y compris certains spécialistes de cet art qui n'ont pas manqué d'ovationner ces Sahraouis, armées de luths, violons, mandolines, et, tenez-vous bien, d'une contrebasse (une seconde première !) venus bousculer le temple citadin. Après une Touchia, Raml el-Maya, jouée en vertu des règles propres de l' « Andalou saharien », les hommes de Saâd Bouchouireb, le chef d'orchestre, se sont donnés et ont donné du plaisir en entonnant une Nouba aux couleurs ocres, portant de nouvelles — et très originales — sonorités émanant de cette grande porte du Sahara qui abrite l'une des plus grandes confréries du soufisme, Tijania, grand pôle du savoir religieux et de la poésie surtout. « Nous revendiquons un style particulier dans notre façon de jouer la musique andalouse. Contrairement aux idées reçues, la ville de Laghouat compte de nombreux artistes et mélomanes qui font les beaux jours de cette musique. Nous tenons cette singularité de notre grand maître Cheikh Mohamed, plus connu sous le nom de Rey Malek. C'est vous dire que l'Andalou à Laghouat n'est pas de récente apparition », nous explique le patron de cette troupe créée en 2004 et comptant à son actif plusieurs participations artistiques dont le Festival de musique andalouse organisé à Laghouat en 2007, au 2e Festival national Hawzi de Tlemcen en 2008, ainsi qu'une participation à la seconde édition du Festival çanaâ d'Alger, la même année.